jeudi 22 mars 2012

Allez les filles

Il suffit de faire une recherche basique sur les citations et proverbes qui ont pour mot-clé le mot "fille" pour mesurer à quel point le mépris affiché envers ce membre de la famille est vivace.

De "Faites faire des études à vos filles. Comme ça, plus tard, elles pourront penser en passant l'aspirateur" (Régis Hauser) à  "Nourrir les filles, c'est engraisser des vaches dont on n'aura jamais le lait" (proverbe sénégalais) en passant par le pathétique "S'il y en a qui ont dix-huit filles, ils ont un terrain de golf" (Christophe Dechavanne) les manifestations de haine sont légion et avoir une fille semble se résumer au mieux à une opportunité (parfois perdue) et au pire à une calamité voire une honte. Quant il ne s'agit pas tout naturellement de rappeler qu'une fille appartient à son père.

J'ai trouvé mille façons de dire qu'avoir une fille ne valait pas grand chose... et rien sur la joie, la satisfaction ou encore la fierté que cela pouvait procurer.

Les pères sont souvent déçus de n'avoir pas eu de fils (ou de n'avoir eu que des filles, c'est pareil). On sent bien derrière ces familles à 4 ou 5 filles qu'un père a usé une mère pour avoir LE fils qui n'est jamais venu. Moi qui ai deux filles, je me suis souvent entendu demander par des personnes aussi différentes qu'intrusives quand je me déciderai à avoir un garçon ... A l'inverse, l'une de mes amies s'est vu refuser par son compagnon le second enfant qu'elle désirait au prétexte qu'il avait déjà eu, avec le premier, le fils qu'il voulait, SON fils.

Quand son ventre fut rond
En riant aux éclats
Elle me dit allons jubile
Ce sera un garçon
Et te voilà
Cécile ma fille ... aïe !

Il n'a pas eu SON fils ...

"Tel père, tel fils", le grand fantasme, fait d'ailleurs écho à l'insistance de certaines personnes à trouver des ressemblances entre un père et son (ses) fils malgré des évidences parfois frappantes. Un exemple célèbre: Thomas Dutronc, dont on aurait du mal à faire le rapprochement avec son père si le nom de famille ne venait à notre secours, n'a rien, contrairement à ce que l'on peut entendre et lire partout, des attitudes, des traits ou même de la façon de faire de la musique qu'a son géniteur. D'ailleurs, en parlant de géniteur, l'ironie du sort qui est parfois mordante révèle de temps en temps que des fils dont on nous a rebattu les oreilles avec les similitudes en tous points avec leur père ne sont finalement pas les fils de leur père ... 

Bref, ce constat jure tristement avec le désintérêt réservé aux filles. Mais, parmi la multitude de phrases odieuses et méprisantes sur les filles, parmi les déceptions à peine voilées (parfois même la rage) qui entourent la naissance des filles, j'ai déniché cette exception:


" J'avais une fille. Je débordais de fierté. Une fille. Le plus cadeau que la vie puisse faire à un homme."
Jean-Paul Dubois dans Une vie française.
Pour parfaire cette modeste réhabilitation, je rajouterais "à une femme aussi" car "Une maison sans fille est une maison morte".








 

26 commentaires:

  1. Bonjour !
    juste pour contre balancer un peu, il me semble que Nougaro a écrit une chanson d'amour à sa fille, que je trouve très belle ! (et le "aïe" ne fait pas partie des paroles, là comme c'est écrit on dirait !)

    Et bien sûr, je ne me reconnais pas dans la phrase "Les pères sont souvent déçus de n'avoir pas eu de fils", qui me semble venir d'un autre temps, ou d'ailleurs (en Inde par exemple où c'est un grave problème). Mais je ne suis peut-être pas représentatif (mais les citations cueillies sur le net le sont-elles ? j'espère que non !!)

    Et dernière chose, "Tel père tel fils" est parfaitement valable dans le cas d'un père adoptif, bien sûr ! (mais j'ai peut-être mal compris votre phrase) -- ceci dit, on dit jamais "tel père telle fille", "telle mère tel fils", pourquoi ?

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    1. Cette chanson est effectivement très belle mais on y retrouve les stéréotypes de ce que recherche un père à travers sa fille ... qui n'est jamais la réussite professionnelle ou quoi que ce soit qui l'épanouisse. Elle sera désirée: encore et toujours cette passivité qui nous colle aux basques et cette circonscription à la sexualité.

      "Les pères sont souvent déçus de n'avoir pas eu de fils" n'a jamais eu vocation à décrire la réalité de chaque individu, il s'agit d'une tendance que beaucoup perçoivent parfois confusément et que les citations, reflets d'une société d'autant plus quand elles sont massives, viennent confirmer. Une tendance moins marquée qu'en Inde certes mais toujours palpable (Christophe Dechavanne est un contemporain, par exemple). Le renier c'est faire preuve d'une mauvaise foi qui ne fait que voiler une situation dont on a peut-être honte mais qui perdure malgré tout. Toujours se rappeler qu'il y a de la souffrance derrière tout ça, des petites filles qui apprennent très tôt que leurs parents sont moins fiers d'elles que de leur.s frère.s, par exemple.

      D'ailleurs, vous soulevez très justement cet écart en mentionnant que les "Tel père, telle fille" ou "Tel mère, tel fils" ne sont jamais employés. Un père n'a pas envie que sa fille lui ressemble comme un fils n'a pas envie de ressembler à sa mère. Qui voudrait ressembler à une personne de statut symbolique inférieur ?

      Chuis pas une gonzesse, moi ...

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  2. Mais dingue ! J'ai essayé, j'ai tapé "proverbe" + "fille" et cliqué sur un site qui propose 35 proverbes avec le mot "fille".
    Le premier présenté est celui-ci : La mère la plus heureuse en filles, est celle qui n'a que des garçons". Proverbe chinois.
    Ahurissant.

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    1. Oui, je l'avais vu. S'il avait fallu publier toutes les citations et proverbes dans ce style, j'aurais eu besoin de deux pages :-(

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  3. Chère Héloise, que de justesse dans chacun de tes billets. Cette révolte chevillée au corps que nous éprouvons, tu la restitue dans chacun de tes billets avec une grande intelligence. Le ton calme qui les caractéristique n'en est pas moins une arme affûtée. Et ÇA ME FAIT UN BIEN FOU :)

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    1. Waow ! Merci. Ce qui me fait du bien, ce sont les commentaires comme le tien qui apaisent les rudesses avec lesquelles je suis traitée parce que j'expose une réalité que pas grand monde ne veut voir.

      Alors merci encore pour ton soutien et tes mots pansements :-)

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  4. A Charles : dans la chanson de Nougaro il dit plusieurs choses : qu'il ne voulait pas d'enfant et que sa compagne pour le consoler lui a en quelque sorte promis un garcon. Il est ému d'avoir une fille MAIS c'est par défaut quand même.
    De plus il ne la voit que sur le plan de celle qui un jour va "avoir des hommes". Il n'y a rien d'autres dans cette chanson. Sa fille pour le dire vulgairement est déjà un cul :
    Bien avant que je t'aie
    De fill's j'en avais eues
    Jouant mon cœur à... face ou pile
    De la brune gagnée
    A la blonde perdue
    Cécile, ma fille

    Et je sais que bientô"t
    Toi aussi tu auras
    Des idé,es et puis des idylles
    Des mots doux sur tes hauts
    Et des mains sur tes bas
    Cécile, ma fille

    (etc)
    Voilà tout ce à quoi il pense devant un bébé de sexe féminin. C'est triste (même si les rimes sont impecs ainsi que la musique, cela n'améliore pas le contenu).
    Sinon il y a des filles non désirées parce que filles, il y en a bien une sur deux. Moi j'en fais partie.
    Et un jour que je me baladais avec ma fille dans son berceau, j'ai rencontré un type qui m'a demandé de quel sexe était ce beau bébé et quand j'ai dit que c'était une fille, il m'a fait : "un coup pour rien, alors !". Texto. Et ceci ne se passait pas au moyen-âge.

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    1. Hé mais c'est vrai, pour cette chanson, maintenant que vous le dites... c'est pas terrible. Je l'ai écoutée il y a longtemps, et maintenant que ma fille est née, lire ces paroles, ces amalgames (ses précédentes conquêtes et sa fille), ça me ... (je trouve pas le mot : dégoûte ? révolte ? entre les deux.)

      Ton anecdote, Euterpe : 'tain chuis sul'cul (si je puis me permettre). Même si ils sont rares à proférer ouvertement de telles conneries, ça doit être effectivement bien enraciné au fond de notre culture. Il n'y a que la réflexion, et un zeste de provocation pour la faire démarrer, qui pourront déraciner tout ça. Ce site y contribue !

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    2. Merci Charles de témoigner que vous comprenez ! Ce n'est pas si courant. Et puis ces mots que je cite font tellement mal...

      Oui Nougaro moi je l'aimais bien à une époque mais cette chanson m'a déplu. c'est un hommage apparent seulement ou plutôt un message double : hommage et femmage. Si on considère le femmage comme étant le contraire d'un hommage. D'ailleurs dans hommage, il n'y a pas "femme".
      Et puis en effet il y a quelque chose de limite incesteux qui choque.

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  5. Nougaro, comme tous les français d'hier et d'aujourd'hui est un misogyne parternalisant, ce qui fait mieux passer les choses et anesthésie celleux qui l'écoutent ; effectivement, de prime abord en entendant la chanson "Cécile", quand on reste à la surface de la chansonnette, de la mélodie (il a du talent, le bougre) on se laisse facilement avoir. C'est comme pour les chansons de JJ Goldman, on les fredonne tout-e-s, il a le don de faire des ritournelles bien balancées qui se mémorisent facilement,et puis un jour on écoute réellement, et on entend l'assommoir culturel à l’œuvre et en pleine action. Ce matin, dans ma voiture, j'ai réentendu "Elle a fait un bébé toute seule" : sous la musiquette, les jolies paroles, il développe son idéologie patriarcale condescendante, à tel point qu'on a envie (enfin, moi) de tourner le bouton. Mais j'ai les oreilles sensibles, la peau irritable, et l'emmerdomètre réglé vraiment bas !

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    1. Oui, ça s'appelle du sexisme bienveillant ... Un oxymore qui relève pourtant bien qu'on peut faire du mal tout en faisant croire que l'on fait du bien. Enrobé de belles notes et de jolis mots, ça fait des ravages !

      L'emmerdomètre ... j'adore ;-)

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  6. "Une maison sans fille est une maison morte"."

    À souligner la connotation misandre de cetteb phrase, qui réduit l'homme à "une mort, un rien".

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    1. Vous nous fatiguez avec votre égo de dominant blessé: je viens de dire que je n'ai trouvé qu'une citation en faveur des filles (parmi une tonne faisant l'apologie du fils et une autre tonne méprisant les filles) et vous venez encore la ramener. Du pur délire !

      Vous ne comprenez décidément rien ...

      D'autant plus que la phrase ne réduit pas les hommes à la mort: c'est l'absence de filles qui cause la mort.

      Je crois que ce que vous ne supportez pas c'est la réhabilitation des femmes, des filles. Si vous n'êtes pas les stars, plus rien ne va.

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  7. "Une maison sans fille est une maison morte"
    Je viens de commencer le bouquin...Cette phrase m'a fait tiquer, parce que tout de suite, j'ai eu le réflexe: Ben oui, la maison elle est morte si il y a personne pour faire le ménage...(mais je sais, c'est mauvais esprit)
    @Gabriel: Qu'est ce qui vous dit que la maison n'est pas vide lorsqu'il n'y a pas de filles? Après tout, les lesbiennes, ça existe! Il n'y a pas un homme dans toutes les maisons (voir aussi le nombre de familles monoparentales avec à leur tête surtout des femmes)!

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    1. Oui, logique vu que ce sont en général des femmes qui ont une aversion illimitée pour les hommes (comme vous).

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  8. On n'en finira pas de trouver des anecdotes dévalorisantes pour les filles. je crois qu'en lisant de ci de là les blogs féministes, j'ai eu une sacrée chance, avec mon grand-père, avec mon père, qui tous deux avaient de l'ambition pour moi. Du coup je n'ai jamais compris le complexe de castration cher à Freud :)


    Pour comprendre cette domination il faut aussi s'intéresser à la paléontologie. Pascal Picq évoque l'agriculture comme coupure entre les squelettes des hommes et des femmes. Avant, il semblerait que la force et la corpulence fussent équivalentes. Après l'invention de la meule, au début les stigmates sur les squelettes sont identiques, puis quelques siècles plus tard, seules les femmes ont des stigmates de l'utilisation de cet outil. Il remet donc en question les rapports hommes/femmes dans la préhistoire...
    Je trouve passionnante cette recherche qui expliquerait pour quelles raisons et partout dans le monde le mâle dominateur a soumis la femme.
    Je sais qu'aujourd'hui on a des combats fermes à mener pour que cesse cette domination, mais en trouver les sources peut également être une aide précieuse pour équilibrer les relations.

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    1. C'est super intéressant ce qu'apporte Pascal Picq, je vais essayer de trouver de quoi en savoir plus ! J'avais déjà entendu ou lu des hypothèses sur la corpulence des femmes à la Préhistoire qui aurait muté en raison de la division sexuelle du travail mais je ne me rappelle qui en était l'auteur.e (pas P.Picq, c'est sûr). En tous cas, il est évident que ce que nous faisons (ou ne faisons pas) depuis des générations a une incidence sur notre morphologie et notre physiologie (là, je pense aux poils, notamment). Comme C.Vidal parle de la plasticité du cerveau, P.Picq évoque l'hypothèse d'une plasticité du corps (c'est vrai au cours d'une vie, ça doit forcément l'être à travers plusieurs générations). Ca me fait d'ailleurs penser aux résultats des sportives dont l'écart avec ceux des sportifs diminuent à une allure assez folle depuis qu'elles n'en sont plus interdites.

      Bref, votre commentaire ouvre la réflexion, merci !

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  9. @ Gabriel

    Les lesbiennes le seraient en raison d'une aversion illimitée envers les hommes, donc ? Et lors de votre prochaine intervention, vous nous direz qu'elles le sont parce qu'elles ne vous ont pas connu, vous ?

    Les lesbiennes sont lesbiennes pour de multiples raisons parfois dramatiques (abus sexuels, violences, etc.). Si certaines fuient par le lesbiannisme les violences masculines, sachez que d'autres préfèrent tout simplement les femmes aux hommes. Votre égo bouffi de dominant survivra-t-il à ces constat ?

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    1. Mais arrêtez avec votre "dominant", rassurez-vous je ne domine personne.

      S'il ne s'agissait que de moi... Je m'en fous complètement d'attirer des lesbiennes ou pas. N'empêche, les femmes les plus misandres sont généralement lesbiennes.

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    2. A Gabriel : pur cliché. Quant on sait que les hommes les plus misogynes se trouvent partout : chez les gays autant que chez les hommes mariés, chez les analphabètes autant que chez les grands savants, chez les religieux autant que chez les laïcs, chez les jeunes autant que chez les vieux, etc...croyez bien qu'il en est de même pour les femmes. Car ce que vous ignorez ce que nous sommes de la même espèce (merci Healcraft*)
      Critiquer la domination masculine et être misandre ne sont pas une seule et même chose. La preuve : des hommes critiquent également la domination masculine. Extraordinaire, non ?

      * clin d'oeil à quelqu'un qui passe parfois par ici et qui rappelle cette vérité de temps en temps.

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    3. Merci Euterpe d'avoir répondu à Gabriel. Moi, j'en ai ma claque de ces mascus de mes deux. Ils me pourrissent la messagerie de mails incohérents et super virulents. Je ne les publie plus dorénavant, je ferai un billet pour les en informer.

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    4. La pauvre, elle se sent harcelée par des commentaires qui ne lui plaisent pas, elle n'a que ça comme souci dans sa vie, vous imaginez...

      Mais, oui, ne publie plus, tu prouveras une fois de plus ton courage débordant, comme à ton habitude. Et tu nous donneras raison par ton attitude, comme tu l'as déjà fait avec ton billet vindicatif, puéril et pathétique le mois dernier...

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  10. Non, mais vous avez quel âge Gabriel ?

    Ce blog n'a pas vocation à recevoir des trolls de votre espèces. Ce blog à une visée militante, informative et réflexive. Que la condition des femmes ne vous intéresse pas ou, pire, qu'elle vous satisfasse c'est votre problème. Allez baver ailleurs que nous sommes paranos, futiles et "à côté de la plaque" ...

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  11. A Héloïse : ne me remercie pas, simple solidarité !:) (Malheureusement maintenant il est allé pressé ses comédons sur le blog d'angrywomenymous...on leur sert vraiment de poubelle...:()

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    1. J'ai cherché sur le blog et n'en ai pas trouvé de traces. Sous quel billet a-t-il fait sa goutte ?

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  12. Sous "Journalistes français : Entre opportunisme et complicité " mais il l'a casée en 16e position sur 28 commentaires.
    Tu peux aussi chercher dans la liste des commentaires en interne visibles par les administratrices. Il est signé Gabriel et c'est l'avant avant avant dernier com' si on ne compte pas mes réponses.

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