vendredi 11 mai 2012

L'énigme de la femme active (et souffrante)

Celles et ceux qui me connaissent un peu savent que je me méfie des psys et de leurs dogmes essentialistes autant que d'un article progressiste dans Libé. Rien donc n'aurait dû me pousser à emprunter cet ouvrage écrit par une docteure en psychologie, Pascale Molinier, et encore moins son titre, "L'énigme de la femme active" ... Pourtant, je l'ai malgré tout présenté à l'agente en charge des emprunts de la médiathèque - on fait des trucs de ouf parfois - prête à dénoncer ici-même s'il le fallait les arguments pro-ordre hétérosexiste que j'étais persuadée d'y trouver.

Déjà embarquée dans mes certitudes que le féminisme est si marginal qu'une médiathèque de petite ville (du Sud-Est qui plus est, cf. les résultats de l'élection présidentielle dans cette région) ne peut proposer que du "Pourquoi les femmes ne pètent jamais et les hommes sont poilus", je n'ai pas compris le sous-titre "Egoïsme, sexe et compassion". Perdue, j'étais.

Pourtant, il ne m'a fallu que quelques pages, deux citations (Delphy et Mathieu) et trois respirations avec le ventre en vue de me relaxer pour comprendre que je tenais là les écrits d'une psy ouvertement féministe. Egoïsme pour les uns, compassion pour les autrEs sont les deux versants d'une éducation sexuée que pas grand monde n'est prêt à remettre en question tant la disponibilité sacrificielle des unEs arrangent les autres. Voilà dans les grandes lignes la teneur du propos. Et pour l'application, Molinier s'est penchée sur le monde du travail, plus particulièrement sur les infirmières et les stratégies qu'elles mettent en place pour pallier l'usante et quotidienne confrontation à la souffrance voire la déchéance humaines.

Un bon livre n'enfonce pas des portes ouvertes et c'est le cas. Dès le premier chapitre, une réflexion sur le traitement médiatique de la souffrance liée au travail selon le sexe surprend et fait cogiter:

"Dans l'archipel des conditions malheureuses, il en est de plus en vue que d'autres. La souffrance des hommes inquiète, dérange, interpelle. Celle des hommes pauvres justifie qu'on multiplie les "observatoires", tant sont redoutées ces flambées sporadiques dans la rage et le saccage.[...] Quant à la souffrance des hommes dominants, ce n'est rien de dire qu'elle fait recette ! Qu'on me pardonne ces trivialités, mais "le stress des cadres" a fait couler plus d'encre ces dernières années que celui des caissières d'hypermarché. 
[...]
Que les souffrances féminines soient perçues et vécues sur le plan du drame personnel et qu'elles ne soient pas contextualisées dans la perspective d'une crise identitaire collective, cela ne doit pas nous étonner. Parce que la souffrance est déjà contenue dans la définition de la "nature féminine", quelle que soit la connaissance que nous ayons, par ailleurs, des discriminations fondées sur l'arbitraire du sexe, il demeure que la souffrance des femmes est moins immédiatement saississable que celle des hommes en termes de causalité et d'injustice sociales.
[...]
Dans cette souffrance, nous entendons d'abord, et essentiellement, un problème de psychologie individuelle plutôt que l'écho singulier d'un drame pluriel."

La première chose qui frappe c'est cette constante selon laquelle tout ce qui arrive aux femmes est intrinsèque à leur nature vulnérable quand n'est pas instillée l'idée qu'elle sont les premières coupables de leur sort. Les femmes sont censées vivre des drames personnels même dans le cadre du travail qui s'inscrit par essence dans les problématiques de société ! Les violences conjugales, le viol ou l'exploitation domestique sont de la même façon sorties du cadre du phénomène social collectif. On ne sait jamais, des fois qu'il y aurait des solutions à trouver  ...

Ensuite, il y a cette psychologisation abusive de la souffrance des femmes. J'en avais parlé dans un vieux billet, "Femmes et santé mentale", le processus permet de fragiliser plus encore les femmes ainsi dotées d'une psyché naturellement bancale et de faire fi des conditions de vie honteuses dans lesquelles le système oppresseur les maintient. Le bénéfice est double, qui, soucieux de maintenir sa supériorité en créant l'infériorité de l'autre, s'en priverait ?

Dire que les femmes ont un sacré mental, constituant 80% des travailleur.e.s pauvrEs, l'essentiel du personnel des métiers improductifs (mais nécessaires), difficiles et sous-rémunérés et l'unique ressource gratuite du travail domestique, n'est pas une vue de l'esprit. Une triple peine (précarité, pénibilité, exploitation) qui ne mobilise que les vendeurs de palliatifs (magnésium, anti-dépresseurs, torchons ou bouquins pour concilier vies personnelle et professionnelle, etc.) et jamais les grands dossiers sur la souffrance au travail. 

Probablement parce que la souffrance des femmes fait partie d'un éternel féminin auquel le renoncement conduit à une réelle émancipation. La beauté de la vertu, souffrir en silence, est censée transformer ses ravages en dommages collatéraux inévitables et indispensables. Et si féminins. Pour un peu, certains en feraient, ultime argument du moment, un truc glamour et sexy.
Ah! c'est déjà fait ? Au temps pour moi.





20 commentaires:

  1. J'ajouterais que, preuve en est que les femmes ont un sacré mental, c'est que, malgré les difficultés de leur oppression, ce ne sont pas elles les premières à reporter leur rage sur les autres et à commettre agressions physiques sur d'autres personnes (il suffit de voir le différentiel f/h énorme des personnes incarcérées pour agressions physiques).

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    1. Ouiii, l'auteure en parle un peu plus loin, je n'y suis pas encore mais en feuilletant le livre, j'ai aperçu des passages sur la façon qu'ont les femmes de "gérer" leur colère ou leur violence. J'en parlerai probablement ici car ses thèses semblent intéressantes.

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  2. a ko : normal elles retournent leur colère contre elles-mêmes ! Question comportements autodestructeurs, il me semble que les femmes remportent la palme. Si on considère la prostitution comme un comportement autodestructeur, l'anorexie, la boulimie, le fait de se scarifier ou de s'infliger des coupures, l'alcoolisme, la drogue, la dépendance aux médicaments, aux tranquilisants, les conduites à risque en tout genre (partenaires multiples (sans préservatifs), grossesses multiples, avortements multiples)...
    Et puis qui font le plus de cures de santé ? Qui sont les plus nombreuses chez le/la médecin, en psychiatrie, en thérapie, en analyse, etc...?
    Quant aux maladies psychosomatiques elles sont surtout le fait des femmes.

    Il y a donc bien souffrance et tentatives d'échapper à la souffrance soit en l'anesthésiant au moyen d'une autre souffrance, soit en se faisant soigner soit, également, en faisant souffrir.
    Car il y a aussi des femmes maltraitantes sans être violentes à la manière masculine. Parfois il suffit qu'elles ne protègent pas un enfant contre la violence masculine. Dans tous les cas, elles martyrisent aussi des plus faibles. Un gosse, un homme plus jeune et trop amoureux,...cela leur arrive aussi de trouver de quoi soulager leur agression sur autrui. Ce ne sont pas non plus des saintes.
    Seulement les fils qui se plaignent de mères maltraitantes dans la littérature (Bazin,Mauriac et d'autres plus contemporains) ne pensent jamais à essayer de comprendre la position d'opprimée de la femme qui l'amène à ce comportement.

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    1. J'ai effectivement entendu dire que les femmes retournaient leur colère contre elles-mêmes d'où les pathologies de type dépressif/anxieux et rarement agressif.
      De toutes façons, on ne peut, à l'ère de l'épanouissement personnel, être heureuse et opprimée. Il y a forcément hiatus entre le désir d'accomplissement personnel et le carcan domestique d'une part et les encouragements à soigner son estime de soi et l'infériorisation systématique d'autre part. Personne ne vit bien l'infériorité même intériorisée.

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  3. Complètement! Si toutefois on leur permettait d'exprimer leur rage, d'une façon ou d'une autre... Ah, lorsqu'on le fait, on est hystérique..
    Bravo Hélo, comme d'hab!

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    1. Et d'ailleurs le coup de l'hystérie n'est-elle pas un moyen parmi d'autres de dressage ? Il sera décrêté que la colère chez les femmes est pathologique; source de créativité et pivot de la justice chez les hommes. Double standard d'une émotion naturelle et humaine.

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  4. Jean-François12 mai 2012 à 17:52

    Comme d'habitude, assez d'accord avec l'essentiel du propos. Je reviendrais quand même sur deux réflexions dans le commentaire d'Euterpe.

    La question des "comportements auto-destructeurs" me semble minée. Tout y est intriqué: comportements à risque mais valorisés, comportements à risque par ignorance, comportements vraiment autodestructeurs (style suicide à plus ou moins long feu), pour le peu qui me vient à l'esprit. Si on va par là, l'essentiel des comportements autodestructeurs est le fait d'hommes, généralement jeunes, et qui le paient tout de suite (morts violentes) ou à plus long terme (alcoolisme en tête). Bref, je trouve le terrain de cet argument glissant.

    Quant à la surfréquentation féminine des milieux de soins, médicaments et autres, il paraît qu'elle est avérée, oui. Mais je crois qu'elle est moins liée à un besoin objectivement plus grand de médications en tous genres qu'à une bien plus forte sensibilisation des femmes aux problèmes de santé, qui tient tant au matraquage publicitaire qu'à la fonction de soignantes des femmes (comme mères, médecins, infirmières...) et au message qu'on leur fait généralement passer sur leur faiblesse intrinsèque.

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    1. @Jean François
      J'ajoute à votre commentaire le fait que si les suicides sont effectivement majoritairement le fait d'hommes, les tentatives sont elles majoritairement féminines.
      Par ailleurs, quelquechose qui me semble pouvoir jouer un part dans la possibilité d'une différence de genre quand aux comportements auto-destructeurs est celle de l'élevage d'enfants, qui incombe encore majoritairement aux femmes. Difficile, lorsque des personnes dépendent encore de vous, de disparaître (mais je n'explique par là pas le différentiel h/f de suicides/tentatives chez les adolescent-es, qui généralement, ne sont pas encore parents).

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    2. A Jean-Francois : je crois que le terrain est surtout glissant pour vous puisqu'en parqu'en excluant des statistiques l'anorexie qui tue mais pas tout de suite ainsi que toutes les formes de suicide féminin qui ne tuent pas à l'instant même, on les fausse et fait croire que les garcons se suicident plus. Seules les formes se distinguent. De par leur socialisation l'autodestruction des filles est souvent plus discrète, masquée, lente et non spectaculaire mais certainement pas moins importante.
      Quand on parle de suicide, on devrait distinguer les suicides immédiats des suicides différés. Cela changerait énormément le résultat.
      Quant à la fréquentation des cabinets médicaux j'y vois plus là une recherche d'aide, des appels à l'aide.

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  5. Jean-François14 mai 2012 à 13:51

    Nous sommes bien d'accord, c'est entre autres ce que j'évoque à travers les "suicides à plus ou moins long feu" - eux-mêmes plus ou moins volontaires etc. Je ne tiens pas à ce que les garçons se suicident plus, mais cherche simplement à participer à la rigueur du débat. Le problème sur lequel achoppe l'idée d'une plus grande autodestruction des filles et des femmes, qu'elle soit volontaire, involontaire, immédiate ou à long terme, me semble être fondamentalement que les hommes, surtout jeunes, sont nettement en surmortalité. Quelle est la part de l'inconscience, de la prise de risque ou du désir de mort, c'est difficile à dire. Mais ça me semble nécessaire si l'on veut tenir ensuite un discours sur la mortalité féminine (et vice-versa) dans un contexte de critique du genre. Sinon, on se retrouve comme signalé dans l'article à faire de grands développements sur le blues des cadres en oubliant les ouvriers ou les caissières.

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    1. Je pense qu'il ne faut pas oublier le paramètre du mobile dans le suicide et quand on l'analyse à travers le filtre du genre, il est parlant. Je ne peux qu'être d'accord avec vous sur le taux de suicides des hommes, notamment parmi les plus jeunes puisque ce sont les chiffres qui le posent.
      Mais un jeune homme qui se tue pour avoir roulé trop vite n'est pas une jeune fille qui se tue en ne s'alimentant plus. Il n'y a pas de souffrance à la base des conduites à risque masculine, seules les conséquences sont parfois porteuses de souffrances. De plus, dans le prolongement de la réflexion d'Euterpe, on peut soulever la problématique du "spectacularisme". Les hommes entretiennent un rapport de force avec la mort et si celle-ci doit survenir, il est important qu'elle soit spectaculaire, démonstrative, visible (cf. les garçons ou même les hommes se montrant leurs blessures et cicatrices dans une surenchêre ridicule), c'est tout l'enjeu de la virilité. Quant aux femmes, elles sont sommées d'avoir l'auto-destruction discrète voire invisible comme tout ce qui les concerne en fait. Quoi de mieux qu'une dépression pour se retirer de la vie sans signe extérieur et ostentatoire de souffrance ? Et puis, pas de risque d'échapper au devoir de culpabilité: la dépression, montrée du doigt comme une faiblesse, est souvent imputée à la personne qui en souffre. Pendant qu'on plaint et panse les "blessures de guerre" des hommes ...
      Bref, les hommes ne se détruisent pas parce qu'ils se haïssent (en général, hein !) mais parce qu'ils veulent acquérir ou conserver un statut de puissant ou encore parce qu'ils ont perdu ce statut de puissant (perte d'emploi dans ce qu'il comportait de reconnaissance sociale, divorce, etc.). Les femmes se détruisent parce que leur statut d'inférieures ainsi que leurs conditions de vie deviennent insupportables. La nuance est à mon sens de taille.

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  6. A Jean-Francois : la surmortalité masculine et la souffrance ne vont absolument pas de pair ! La surmortalité masculine est pour une part non négligeable due à la croyance masculine à l'invincibilité. Donc rien à voir avec du suicide ! Et beaucoup plus à voir avec le virilopotisme imbécile.
    Les adolescents et les jeunes hommes ont des accidents stupides justement parce qu'on leur a inculqué qu'être un mâle c'est quasi être un dieu. Or un dieu est immortel.
    Le cas le plus "célèbre" fut celui du fils puîné de Francois Ier que l'on prévint contre la contagion de la peste et qui se roula exprès dans le lit d'un pestiféré pour prouver qu'en tant que fils de roi sacré (à Reims) il était invulnérable à la peste. Résultat il est mort à 23 ans d'une manière particulièrment idiote. Et il ne fut ni n'est le seul.

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    1. Ah ! Zut, je n'avais lu ton commentaire. Du coup, je suis dans la redite avec ma réponse à Jean-François ci-dessus ! Parfaitement d'accord avec toi, donc :-)

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    2. Jean-François16 mai 2012 à 01:31

      @ Héloïse: dont acte pour la réflexion sur le suicide masculin comme conséquence d'une déchéance de la virilité, et féminin comme résultant d'une haine de soi (en général, oui). Je garde l'idée en tête!

      @ Euterpe: assez d'accord avec vous, à l'absolument près. Et merci pour l'exemple rigolo du fils de François 1er.

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  7. Merci de partager tes lectures :)
    Je ne sais pas quand Pascale Molinier a écrit ce livre, mais dernièrement elle (à moins que ce soit une homonyme?) a cosigné un article "Prenons soin des putes", anti abolitionniste, avec toutes les idées reçues sur la prostitution. Beaucoup de compassion, oui, mais pour les clients prostitueurs

    http://multitudes.samizdat.net/Prenons-soin-des-putes

    Sandrine Goldschmidt en parle ici

    http://sandrine70.wordpress.com/2012/05/08/vers-une-societe-du-bien-etrepour-les-hommes/

    Je suis toujours étonnée que des femmes sensées puissent perdre leur faculté de raisonner quand il s'agit de prostitution.

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    1. Au regard des thématiques abordées dans l'article, il semble bien qu'il s'agisse bien de la même personne. P. Molinier est spécialisée dans le care. C'est d'ailleurs le thème central de l'ouvrage dont je parle. Je ne comprends pas ce qui a pu se passer depuis 2003, date à laquelle il est sorti. Deux choses sont incohérentes: elle souhaitait à l'époque plus d'égoïsme et moins de compassion de la part des femmes. Or, elle pose avec ses confrères les prostituées comme les soignantes sexuelles de la société, Grisélidis en modèle ! De plus, dans son livre, elle évoque lors d'un long chapître les ressorts de la pornographie, anti-chambre de la prostitution, avec une certaine fermeté. Je ne l'ai pas terminé mais il me semble que l'ensemble est plutôt assez critique envers la virilité, ses soi-disants besoins et le pendant à tout ceci, la disponibilité des femmes.
      Je suis vraiment très énervée au choix:
      - de m'être fait rouler
      - qu'elle ait retourné sa veste avec si peu de scrupules

      Merci pour l'info en tous cas ;-)

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  8. Pareil concernant Molinier. J'avais lu d'elle un livre sur le care dans lequel, commentant un cas d'attouchements sexuels de la part d'un patient (sénil) envers ses aides-soignantes, elle disait que accepter les pelotages leur permettaient de faire leur travail efficacement (puisque ce patient n'acceptait d'être lavé qu'à condition de toucher les fesses des aides-soignantes).
    Cela ne lui était pas venu à l'idée qu'une absence de prévention contre les abus sexuels dans la structure dans laquelle ces femmes travaillaient pouvait faire qu'elles n'avaient pas d'autre choix que de le laisser les peloter pour continuer leur travail, et éviter d'être virées (la toilette étant, de plus, souvent chronométrée).
    Bref, un céder, mais pas forcément un consentir, comme dirait Mathieu.
    Ce passage est à mon sens en tout cas assez éclairant pour comprendre comment Molinier a pu en arriver à faire un lien entre care et prostitution.

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    1. Il y a la même anecdote rapportée dans l'ouvrage dont je parle et j'avoue que ce passage m'a laisée dubitative car la misogynie violente qui s'en dégage n'est pas mise en perspective. Ce que je ne comprends pas, c'est comment elle a pu passer d'une critique du care tel qu'il est imposé aux femmes (à travers le bénévolat domestique et souvent la profession)- elle en relève d'ailleurs les dégâts - et une défense de l'institutionalisation de ce care pour les femmes au moyen de la légalisation de la prostitution. Par ailleurs, toujours dans cet ouvrage, elle critique avec aplomb la virilité qui necessite l'objectivation des femmes et se met dans cette tribune à exhorter au recours à la prostitution pour protéger cette virilité. Elle me fait carrément penser à Badinter qui a écrit un ou deux essais féministes puis a retourné subitement sa veste et s'est placée du côté des mascus.

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    2. Concernant l'institutionnalisation du care, l'on va dire (prostitution et ménage pour les personnes qui peuvent le faire elles-mêmes mises à part) que c'est, à mon sens, un moindre mal. Certes, ce sont toujours les femmes qui le font, mais au moins sont-elles payées pour ce travail (qui doit de toute façon être fait, je parle par exemple des aides de vie aux personnes agées), et ce travail se retrouve dans le secteur public (soumis au code du travail), et peut donc être l'objet de politiques salariales potentiellement plus favorables qu'actuellement. Le versant négatif est que le secteur des services à la personne, tel qu'il a été conçu jusqu'à maintenant est une secteur de travail majoritairement précaire, et peu syndiqué.

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  9. A force de dire à une petite fille, ne te bats pas reste gentille reste sage et à un petit garçon "c'est mignon ils se battent" forcément savoir contenir sa violence ou ses caprices en classe ou en société est plus intégré dans l'inconscient collectif des femmes. Il y a une très grande tolérance à la violence masculine et effectivement des ouvriers menacés de chômage qui ne hurleraient pas, ne casseraient pas passeraient pour des couilles molles, quand une manifestation féministe sans aucune violence passe pour violente et illégitime dans l'inconscient collectif.
    Les hommes sont aussi victimes quelque part de la société ils doivent se conformer à l'image du viril travailleur. Dans mon milieu populaire, j'ai souvent vu des jeunes filles en perte de repère faire un enfant pour acquérir le statut de la MERE SACREE. Alors que leurs frères si ils sont au chômage n'ont pas de statut social. Ils sont déconsidérés parce que la société considère que c'est leur rôle principal que le fait qu'il soit au chômage est plus grave que le chômage que leurs compagnes qui au moins vont s'occuper des enfants. Et ils se suicident plus. Ils pourraient certes choisir de s'investir plus dans le foyer quand il se retrouve au chômage mais socialement c'est encore mal accepté par les femmes même. Combien de discours de peur de la part de beaucoup de femmes j'entends, elles veulent au moins garder la légitimité totale du foyer comme sécurité psychologique et vivent très mal l'insertion de leur conjoint. Je pense qu'inconsciemment elles se disent si je suis au chômage j'aurais au moins mon rôle de mère et ça sera plus accepté par la société que le chômage de mon conjoint.

    Mais le discours "virilisateur" pour les hommes est peut-être aussi un moyen de ne pas trop remettre en cause la panne de l'ascenseur sociale. Parce que certes les garçons ont de moins bons résultats scolaires que les filles sauf dans les catégories supérieures où ils sont poussés (ce qui d'ailleurs remet en cause totalement les arguments sur la féminisation de l'enseignement) et où ils réussissent mieux que leurs soeurs d'ailleurs. Et cela permet aussi d'avoir des discours comme c'est de votre faute si vous êtes au chômage, on est des mecs, c'est la guerre si tu n'as pas réussi c'est que tu ne le mérites pas.
    Un peu comme les discours très anti-anglais de la part de l'élite pour défendre la francophonie sauf que leurs gosses à eux sont dans des lycées internationaux. Et le reste de la population a un accès déplorable à un enseignement pratique des langues qui fait maintenant toute la différence sur un cv.

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