mardi 28 décembre 2010

Triompher sur des cadavres

" Le ventre des femmes, plus inépuisable que celui de la nature, a cru et multiplié tandis que celui de la Terre se flétrissait lentement sous le phallus-charrue, le rouleau compresseur et le poison des revêtements.

Le mâle a triomphé, mais à partir d'un principe de mort."

Cette réflexion de Françoise D'Eaubonne m'a hantée ces derniers temps trouvant un écho troublant dans tout ce que je pouvais constater autour de moi.

Le mâle a triomphé, ce n'est plus un scoop. Il est aujourd'hui propriétaire de 99% de la planète. Il détient le pouvoir partout, des bureaux où tout se décide aux murs des musées. Il est riche. Il est puissant même pauvre. Il est légitime partout et en toutes circonstances. Admettons-le, il a gagné.

Et depuis, il pavoise allant jusqu'à s'auto-proclamer génie, à se poser en référence universelle et, ultime imposture, à se dépeindre partout comme un héros sauveur de l'humanité !  

Seulement, il a triomphé en appauvrissant, en posant les bases de sa propre disparition, selon un principe de mort. Sa victoire n'est que cadavres et terres brûlées, asphyxiées.

Regardez autour de vous, le seul pouvoir qui le fasse vraiment jouir est celui de donner la mort, un fusil à l'épaule ou un joystick dans les mains.

""Pollution", "destruction de l'environnement", "démographie galopante" sont des mots d'hommes, correspondant à des problèmes d'hommes: ceux d'une culture mâle". J'aurais ajouté "colonisation", "esclavagisation" et "pauperisation". N'écoutez plus jamais ceux qui vous disent que c'est l'être humain le responsable, ils mentent, petits arrangements avec la langue: on ne peut pas avoir écarté pendant des millénaires les femmes de tout ce qui fait la situation catastrophique actuelle et les en rendre coupables à l'heure des comptes. On ne sait pas ce qu'une culture femelle aurait engendré, on sait juste où la culture mâle nous a mené.e.s. A la souffrance en premier lieu, puis à notre propre perte.

Il n'est pas question d'un quelconque projet gynocrate porté par quelque féministe que l'on croira allumée, il est question de vie ou de mort "car si la société mâle perdure, il n'y aura plus demain d'humanité". Il faut faire confiance aux premières écologistes de l'humanité, celles qui pratiquaient une agriculture pacifiste avant d'en être violemment dépossédées il y a 5 000 ans; celles qui savent, comme toutes les femelles de toutes les espèces, réguler instinctivement les naissances en-dehors de tout calcul politique ou individualiste.

Il est encore moins question de prôner une culture femelle qui, utilisée par les hommes en place sera forcément dévoyée. Il est question d'ôter le pouvoir aux hommes et de lui substituer un non-pouvoir pour toutes et tous.

Aujourd'hui plus encore, malheureusement, qu'à l'heure où la formule a été lancée par Françoise D'Eaubonne, c'est le féminisme ou la mort.

samedi 25 décembre 2010

Le corps des femmes, faudra penser à l'inscrire au patrimoine matériel des hommes

Emelire en parle ici. L'Humanité aussi, .

Le député Jean-François Chossy (1), qui "planche" sur le projet de loi visant à proposer aux handicapés une assistance sexuelle, avait voté contre la réforme de décembre 2000 concernant l'IVG et la contraception.

S'opposer au droit des femmes à disposer de leurs corps mais proposer que ces derniers soient à la disposition des hommes, handicapés ou pas (ce n'est qu'une question de temps), ce n'est rien d'autre que considérer l'ensemble des femmes comme un cheptel appartenant à la classe mâle.

Dans le cas de cette loi, un vulgaire bien à s'échanger entre hommes, entre prostitueurs et proxénètes.

Voilà en tous cas de quoi illustrer ce que Dworkin (2) en disait:
 
Lorsque les hommes utilisent les femmes dans la prostitution, ils expriment une haine absolue pour le corps des femmes.

Ce sentiment est aussi absolu que tout ce qui existe ou a jamais existé sur terre.
C’est un mépris si profond, si profond que toute une vie humaine s’en trouve réduite à quelques orifices sexuels et que l’homme peut faire tout ce qu’il veut.

[...]

Chaque homme vivant dans cette société bénéficie du fait que des femmes sont prostituées, que cet homme-là utilise ou non des femmes en prostitution. C’est une chose qui devrait aller sans dire mais qui doit encore être dite : la prostitution tient à la domination masculine, pas à la nature féminine. C’est une réalité politique qui existe parce qu’un groupe de gens possède et maintient le pouvoir sur un autre groupe de gens.



J’insiste là-dessus parce que je veux vous dire que la domination masculine est cruelle. Je veux vous dire que la domination masculine doit être détruite. La domination masculine mérite qu’on y mette fin, pas simplement qu’on la réforme, pas qu’on la rende un peu plus douce, pas qu’on la rende un peu plus douce pour certaines femmes. Il nous faut regarder le rôle des hommes -l’examiner vraiment, l’étudier, le comprendre - le rôle qu’ils jouent en maintenant des femmes dans la pauvreté et des femmes dans l’itinérance et des filles dans le viol, et donc en créant une classe de prostituées, une population de femmes qui seront utilisées en prostitution.

(1) Il avait également signé la pétition homophobe de Michel Pinton des maires contre le PaCS ...
(2) dans Pouvoir et violence sexiste (2007)

dimanche 19 décembre 2010

Les Dolle Mina




En 1969 est né l'un des premiers groupes militants féministes hollandais, les Dolle Mina, matronyme choisi en hommage à une ouvrière du XIXème siècle, Wilhelmina Drukker, qui avait oeuvré pour la condition féminine.

Leurs actions, relatées à travers la presse de l'époque, se distinguent par l'ironie qu'elles utilisaient pour dénoncer ce que vivaient les femmes au quotidien. Pour ce faire, elles ont décidé d'inverser les rôles: mains aux fesses des hommes dans la rue ou drague bien lourde. Réappropriation de l'espace public.

Toujours avec l'humour dont elles semblaient ne jamais se départir, elles ont défilé à Gand un 1er mai, avec une couronne mortuaire en guise de symbole des droits des travailleuses ...

Mais derrière la bonhomie de ces impayables femmes de terrain, se cachait une volonté farouche de protéger les femmes. C'est ainsi que, se constituant en factions, elles suivaient ces dernières lorsqu'elles se trouvaient seules dans les rues obscures et s'en prenaient, si besoin était, à leurs agresseurs. Les Dolle Mina étaient à la Hollande ce que les Saris Roses sont à l'Inde.

En France, nous avons bien aujourd'hui ces sacrées farceuses de La Barbe qui s'invitent partout où elles ne le sont pas, invitées. Il n'en reste pas moins que les initiatives audacieuses se font rares et que les médias, à l'affut du buzz le plus creux, les censurent.
A société policée, docile et a-cultivée, créativité et sens de la rébellion anesthésié.e.s.

Source principale: Le féminisme est dans la rue: Belgique 1970-1975 de Marie Denis, Suzanne Van Rokeghem (1992).

En recherchant des affiches du groupe, on tombe sur celle-ci. Je ne sais pas si elle a un lien direct avec les Dolle Mina et, si tel était le cas, quel message féministe elle véhicule. J'en profite donc pour lancer un appel à Euterpe et ses connaissances germanophoniques: quelle est la signification du mot "onthullend" ?


                                                     

Edit: grâce aux lumières d'Euterpe, nous savons que cette affiche a été réalisée en réaction à celle qui suit et qui a été "pensée" par le PSP (Parti Socialiste Pacifiste) néerlandais. Personnellement, j'aurais choisi la même pose ridicule pour l'homme que celle qui a été choisie ici:



 
Edit bis: l'affiche dégradante qui se trouvait à cet emplacement à été supprimée par mes soins. Après moult tergiversations, dénoncer par l'illustration ou pas, j'ai décidé que cet espace ne contiendrait pas de quoi alimenter ce que l'on peut trouver partout ailleurs jusqu'à l'écoeurement, c'est-à-dire la misogynie la plus abjecte.

samedi 11 décembre 2010

KKT: ni à prendre, ni à laisser (3ème et dernière partie)

Avant la pornographie, Virginie Despentes a consacré dans sa King Kong Théorie un chapitre entier à la prostitution qu'elle a intitulé "Coucher avec l'ennemi". Elle ne croit pas si bien dire lorsqu'elle parle de l'acte prostitutionnel en ces termes.

Despentes, dans le cadre de son engagement de féministe pragmatique, milite pour la légalisation de la prostitution. Les arguments règlementaristes, nous les connaissons assez pour faire l'impasse sur leur teneur. En revanche, comme je l'ai fait pour la pornographie, je me suis donné pour objectif de mettre en lumière les incohérences intrinsèques à l'ouvrage lui-même au sujet de la prostitution.

Quand la Docteure Judith Trinquart évoque la parole des prostituées, elle parle d'ambivalence. C'est peut-être ce qui est à l'oeuvre dans le propos de Despentes qui s'est prostituée fut un temps. Quoi qu'il en soit, la vision de la prostitution et du prostitueur qu'elle nous soumet se heurte à toutes les réflexions lucides qu'elle a par ailleurs sur les rapports femmes-hommes. 

Le noeud du problème des femmes pour Despentes c'est la cellule familiale dans laquelle elles deviennent la propriété d'un homme. Se prostituer c'est échapper à ce contrat liberticide, prendre son indépendance. Pourtant, il semble bien qu'en voulant échapper à un seul homme on se retrouve à appartenir à tous les hommes dans la situation prostitutionnelle ... ne parle-t-on pas d'ailleurs de femme publique ? "La pute c'est "l'asphalteuse", celle qui s'approprie la ville" ... ou c'est la ville qui s'approprie l'asphalteuse, au choix. L'espace public, les trottoirs, aux dernières nouvelles, appartenaient toujours aux hommes. Pour quelqu'un qui dénonce avec toute l'ardeur de sa plume le pouvoir masculin, la posture est pour le moins curieuse.

Posture qu'elle défend cependant en avançant le paramètre pécuniaire: bénévolat de la situation conjugale versus indépendance financière de la prostitution. Prendre l'argent où il se trouve: dans la poche du client; ce "pouvoir direct, celui qui permet d'arriver quelque part justement sans avoir à sourire à trois vieux machins en espérant qu'ils vous feront engager comme ci, ou vous confieront cela." Si je comprends bien, sourire à de vieux machins chefs de service ou maris décrépits participe de l'oppression des femmes mais sourire à de vieux machins libidineux c'est libérateur... Le pouvoir direct n'existe pas plus en prostitution que dans toutes les autres scénarios patriarcaux: il faut aussi sourire au client et "compter en plus le temps de préparation, épilation, teinture, manucure, achat de vêtements, maquillage, et le coût des bas, de la lingerie, des trucs vinyle", "jouer le jeu de la féminité", en gros devenir "un jouet géant"... Ca fait beaucoup pour du pouvoir direct ! Celle qui sourit hypocritement à son croûton de patron en vue d'obtenir un avantage financier a au moins l'avantage de ne pas être tenue, pour ce faire, de lui sucer les parties génitales, de se déguiser en soubrette aguichante ou de s'épiler douloureusement le sexe. Celle qui se prostitue, si ... elle n'est d'ailleurs là que pour ça.

Le pouvoir des femmes c'est quand elles accèdent à ce qu'elles veulent sans en passer par la case "hommes", sans avoir à "les rassurer sur leur virilité" en singeant la si délicieuse soumission féminine.

Ces hommes dont elle détaille avec une acuité peu commune les travers au fil des pages, voilà qu'elle se prend à ne les trouver "jamais aussi aimables que lorsqu'ils sont avec une pute", c'est-à-dire lorsqu'ils deviennent des clients ! Aimables mais tout de même un peu tordus quand "ils tendent à mépriser ce qu'ils désirent" quitte à "se mépriser pour la manifestation physique de ce désir". Despentes reconnait à demi-mots que "la dichotomie mère-putain a été tracée à la règle sur le corps des femmes" par les hommes et qu'ils peinent à se libérer de cette "construction politique" qui finit par les enserrer aussi. Elle cite Pheterson qui cite Freud: "[...] presque toujours l'homme se sent limité dans son activité sexuelle par le respect pour la femme et ne développe sa pleine puissance que lorsqu'il est en présence d'un objet sexuel rabaissé [...]". C'est qu'il faut la suivre, la Despentes: la prostitution, qui a donc pour fondement une psycho-névrose masculine, serait un outil d'émancipation féminine !!! Ca, c'est du programme qu'il est féministe !

"Coucher avec l'ennemi" fait partie des pages au cours desquelles je me suis dit plus qu'à n'importe quel autre passage, si ce n'est celui sur la pornographie, qu'elle m'affirmait l'inverse de tout ce qu'elle avançait quelques lignes plus haut. Chaque phrase m'a plongée dans l'incompréhension et j'aurais pu écrire dix billets pour en parler mais je vais m'en tenir là.

Je lui aurais bien laissé le mot de la fin, "... le monde économique aujourd'hui étant ce qu'il est, c'est-à-dire une guerre froide et impitoyable, interdire l'exercice de la prostitution dans un cadre légal adéquat, c'est interdire spécifiquement à la classe féminine de s'enrichir, de tirer profit de sa propre stigmatisation", mais comme il s'agit de mon blog et que c'est moi la chef ici, je me réserve ce privilège:

Et si l'on s'attaquait plutôt à ce monde économique froid et impitoyable plutôt que de proposer de légaliser une activité qui n'a jamais enrichi aucune femme et qui engraisse toujours des milliers d'hommes ? Parce que jamais on ne tire profit d'une stigmatisation quand elle vient des puissants, au mieux on vit avec.

La prostitution comme l'exploitation domestique ou le viol sont des inventions masculines, des armes politiques. Nulle part, jamais, on n'a fondé l'émancipation de quelques opprimé.e.s que ce soient sur le terrain de leurs oppresseurs.

mardi 7 décembre 2010

Lire ? C'est pour les gonzesses !

Un article à ne pas louper chez Nouvelle News sur l'écart inquiétant qui se creuse entre les filles et les garçons en matière de compétences face à la langue écrite (trouver l'information, interpréter, réfléchir et évaluer).

Le presque tout frais rapport PISA, dont l'article rapporte les données recueillies, révèle que "sur la moyenne des pays étudiés, la différence de niveau de lecture entre filles et garçons est flagrante puisqu'elle atteint l'équivalent d'une année scolaire".

Travaillant au quotidien avec des jeunes et des adultes en remise à niveau sur les savoirs de base, c'est une tendance que j'ai pu constater sur le terrain. Sur un groupe mixte de 15 jeunes, les garçons sont majoritaires dans les profils d'illettré.e.s: environ une fille pour quatre garçons. Je retrouve les mêmes proportions chez les adultes.

C'est une problématique qui me questionne depuis pas mal d'années, ne pouvant me résoudre à incriminer les hormones, le fonctionnement soi-disant différent du cerveau chez les unes et les autres ou de farfelues prédispositions naturelles.

Alors, une idée comme ça: comme cela a été le cas dans bien d'autres domaines qui ont subitement été dévalorisés parce que féminisés, est-ce que certains garçons ne se détourneraient pas de la lecture (et de la scolarité en général) juste parce que c'est devenu un "truc de filles" ?

samedi 4 décembre 2010

Viol: la honte DOIT changer de camp ... la mobilisation doit continuer

10 idées reçues sur le viol


1. Le viol est un phénomène marginal. Faux, au moins 75 000 femmes sont violées chaque année en France. Autour de nous, parmi nos collègues ou amies, 1 femme sur 10 a subi un viol ou une agression sexuelle ou le subira pendant sa vie. Ce n’est pas un événement isolé mais un phénomène massif.


2. Le viol est le plus souvent commis par un inconnu dans une rue sombre. Faux, l’auteur du viol est connu de la victime dans 8 cas sur 10. Dans 50% des cas, il s’agit d’un membre de la famille ou de l’entourage proche. Dans 34% des cas, le viol est commis au sein du couple. 63% des victimes de viols sont des mineur-e-s.


3. Ce sont surtout les filles provocantes, aguicheuses qui sont violées. Faux, ce ne sont pas la tenue ou le comportement d’une femme qui provoquent le viol ; c’est le violeur qui est coupable. Les victimes de viol sont très souvent culpabilisées ou ressentent de la honte. C’est une inversion des responsabilités. Ce n’est pas à la victime d’être transformée en accusée. Par ailleurs, les victimes de viol sont très diverses : âge, apparence, origine sociale, etc. Le viol concerne tous les milieux, toutes les cultures.


4. Le viol est largement puni. Faux, moins de 2% des violeurs sont condamnés. La législation reconnaît le viol comme un crime depuis seulement 30 ans (loi votée en 1980). Dans les faits, il est peu puni : moins de 10% des victimes portent plainte, du fait de la peur, de la pression de l’entourage, etc. ; la véracité de leurs accusations est souvent mise en doute, et beaucoup de plaintes aboutissent à des non-lieux ; les peines sont rarement lourdes.


5. Le viol est un drame individuel. Faux, c’est surtout un problème de société. Le viol est l’expression d’une volonté de contrôle et d’emprise sur le corps des femmes. Il suppose que les femmes sont à la disposition des hommes pour satisfaire des besoins sexuels soi-disant supérieurs ou naturels. Il est le signe d’une société profondément sexiste.


6. Le viol est provoqué par la testostérone. Faux, ce n’est pas un comportement naturel, mais culturel. Le viol repose sur le mythe d’une sexualité masculine « irrépressible » et « incontrôlable ». Une sexualité « conquérante » est fortement légitimée dans notre société pour les hommes, tandis que l’expression du désir féminin est limité et encadré par plusieurs formes de réprobation sociale. Certains croient que le viol serait jugulé par la prostitution. Or les pays qui ont autorisé et réglementé la prostitution (Allemagne, Pays-Bas) n’ont pas vu baisser le nombre de viols.


7. Quand une femme dit non, elle pense oui ou peut-être : elle a envie qu’on la force. Faux, quand une femme dit non, ce n’est pas oui, c’est non. Une prétendue sexualité féminine passive, soumise aux initiatives des hommes, est également un mythe. L’expression du consentement des deux partenaires est la condition absolue d’une relation sexuelle ; sinon, il s’agit d’un viol. Même si elle est montée boire un verre, même si elle dort dans le même lit, même s’ils ont déjà échangé des caresses… au moment où elle dit non, c’est non.


8. Les hommes aussi sont victimes de viol. Vrai, cela peut arriver, mais les victimes sont des femmes dans 9 cas sur 10. Les hommes victimes de viol étaient le plus souvent mineurs au moment des faits. Que les victimes soient des hommes ou des femmes, 99% des agresseurs sont des hommes.


9. Les violeurs sont tous des psychopathes. Faux, il n’existe pas de profil-type de violeur. Les viols ne sont pas spécialement le fait de psychopathes, d’alcooliques, d’anormaux ou d’obsédés sexuels. Au contraire, ils sont souvent commis par des hommes parfaitement intégrés socialement, parfois même au-dessus de tout soupçon.


10. Le viol est le résultat de la misère sexuelle. Faux, cela n’a rien à voir. Ainsi, les femmes qui n’ont pas de vie sexuelle et en éprouvent de la frustration ne s’autorisent pas pour autant à violer un homme pour satisfaire leurs besoins sexuels. Il s’agit bien d’une tolérance sociale dans un sens et non dans l’autre.


...

Cette nécessaire mise au point sur le viol est issue du site contreleviol.fr sur lequel vous pouvez encore





jeudi 2 décembre 2010

Moins que rien ou pire que tout

Qu'il s'agisse d'un acte estimable, une femme fait toujours moins bien qu'un homme.

Qu'il s'agisse d'un acte condamnable, une femme fait toujours pire qu'un homme.

Inférieure dans le bien et supérieure dans le mal, voilà EXACTEMENT la rhétorique fondatrice de la misogynie.

jeudi 25 novembre 2010

Viol: la honte DOIT changer de camp

Mon petit ami m’a agressée le soir où je lui ai dit que je voulais le quitter. C’est un amateur de films porno, il en regarde beaucoup. Ce soir-là, il avait beaucoup bu. Il devait dormir sur le canapé. Moi, je dormais déjà dans ma chambre. Il est arrivé subitement, furieux. Il m’a forcée à une fellation, après il m’a pénétrée par derrière. Par les cheveux, il me tirait la tête en arrière et a éjaculé en plein sur ma figure.Sonia

Pendant que cet homme me violait, quelque chose m’est apparu très clairement : le viol n’a rien à voir avec un rapport sexuel. C’est un acte de haine et de domination. Même s’il n’y a pas de coups. Pour lui échapper, je me suis réfugiée dans ma tête, en me répétant qu’il ne pouvait atteindre que mon corps, pas ma personne. Mais ma personne, c’est aussi mon corps, et c’est difficile, après cette division, de réconcilier les deux, esprit et corps, de les faire se rejoindre en un seul « moi ».Elisa

J’ai 32 ans aujourd’hui. Quand j’étais enfant mon père regardait des films pornos, ensuite il venait dans ma chambre pour se soulager. Quand j’étais plus grande, il me violait. Ça a duré longtemps. Il disait : même si tu le dis, de toute façon ils ne te croiront pas. C’est ma psy qui m’a aidée à décider de porter plainte.Gaëlle


Voici quelques uns des témoignages recueillis sur le site contreleviol.fr sur lequel vous pouvez

                        SIGNER LA PETITION !


N'hésitez pas à faire circuler le message autour de vous et à visiter les sites des associations organisatrices de cette campagne nationale, Osez Le Féminisme, MixCité et le Collectif Féministe Contre le Viol.

mardi 23 novembre 2010

La fraternité au service de l'égalité

Une petite histoire inventée par un compagnon de féminisme pour illustrer la hantise du macho, l'horreur intégrale du misogyne de base, le tourment suprême du phallocrate: les femmes égales des hommes. 
(merci David !)  



Un jour Jacques proposa le slogan "égalité" pour
représenter la France. Francis, désarçonné, réagit aussitôt :

- Ouais, mais alors faudra que les femmes soient nos
égales ?


- Mais non voyons.

- Bah...


- Bah bah bah... Réfléchis un peu, Francis:
hommes+femmes = hommes = humanité, tu me suis ?

- Euh ... oui, ça coule de source. C'est le béaba des
mathématiques et de la grammaire.


- Ok donc les femmes, ça les concerne pas.


- Marché conclu.


PS: En rédigeant ce billet, j'ai eu une pensée toute spéciale pour la Ligue des Droits de l'Homme et pour tous ceux qui utilisent et défendent le masculin universel en vue d'exclure les femmes des droits humains élémentaires comme le respect, la dignité ... et l'égalité.

dimanche 21 novembre 2010

KKT: ni à prendre, ni à laisser (2ème partie)

Les deux thèses qui m'ont fait mettre de côté KKT sont celles qui concernent la prostitution et la pornographie. Et honnêtement, non pas parce qu'elle défend les deux, souhaitant légaliser la première, mais parce que son argumentaire est incohérent à bien des égards. Les deux domaines sont les plus grands médias de l'humiliation des femmes (avec la publicité), je ne vois pas comment y faire entrer une once de féminisme. Despentes aurait pu éventuellement me  convaincre du contraire si sa théorie n'avait pas comporté des failles abyssales et si je ne l'avais soupçonnée, devant tant de mauvaise foi, de défendre ce qui la fait (ou l'a fait) bouffer.

Pour parler de pornographie, elle s'appuie sur la réaction d'une centaine d'hommes de profils divers face aux questions de David Loftus (Watching sex, how men really respons to pornography). Tous en ont gardé un bon souvenir (!!!) à l'exception de deux homosexuels. Elle en déduit que ce qui choque dans la pornographie c'est qu'elle révèle sans détour ce qui nous fait fantasmer sans passer par la case "raison", les deux homosexuels ayant été gêné par le fait qu'ils se sentaient attirés par les hommes "mais sans l'avoir clairement formulé".

Les hommes aiment la pornographie, n'en sont pas choqués, donc c'est une idée de culs-coincés, qui refusent de voir leur libido en face, que de penser qu'elle est néfaste. Quel raccourci simpliste. Et quelle étrange façon de pratiquer le féminisme que de mettre de côté l'avis des femmes qui, dans leur grande majorité, n'aiment pas la pornographie. Pourquoi ? Parce qu'elles ne s'y retrouvent pas, parce que leurs fantasmes à elles n'existent pas dans la pornographie. Parce qu'on est en présence d'une imagerie créée par et pour les hommes, qui viendra me dire le contraire ? Combien de réalisatrices connues dans ce milieu, à part elle dont le film, médiatisé, a soulevé les plus vives critiques d'ailleurs ? Tous les gang-bangs réunis n'ont pas fait parler autant que ce film. Ca ne t'a pas effleuré, Virginie, que tu touchais là à une prérogative masculine: humilier et dominer à travers la sexualité ? 

Plus loin, Despentes parle des hardeuses, les actrices de films X, et déplore "l'agressivité avec laquelle on [les] traite". Je la rejoins sur sa réflexion, condamnant vivement toutes les violences à leur encontre, mais reste perplexe quand elle dit ne pas comprendre "pourquoi le corps social s'acharne à en faire des victimes, alors qu'elle ont tout pour être les femmes les plus accomplies en matière de séduction" ... Elle qui, à longueur de pages, s'insurge contre la féminité qu'on lui a imposée toute sa vie, elle pour qui la "chaudasserie" (sic) de notre époque n'est rien d'autre qu'une façon, pour les femmes, "de s'excuser, de rassurer les hommes: 'regarde comme je suis bonne, malgré mon autonomie, ma culture mon intelligence, je ne vise encore qu'à te plaire' ". A ses yeux, plaire aux hommes, adopter le "look chienne de l'extrême", "mutiler [son] corps" et "l'exhibe[r] spectaculairement" serait alors anti-féministe et syndrôme de soumission en temps normal et un acte militant dans le cadre de la pornographie ? Formidable ...

Toujours à propos de la pornographie dont elle défend les pratiques les plus violentes comme le gang-bang (ce billet est finalement plus long que prévu, je reviendrai sur la prostitution dans une troisième partie), elle affirme qu' "il est évident que beaucoup de femmes mouillent à l'idée de se faire violenter, gang-banger ou baiser par d'autres filles". Pourtant, dans le chapitre qu'elle consacre à son viol, elle incrimine l'éducation judéo-chrétienne d'avoir semé chez elle le fantasme du viol: "Les saintes, attachées, brûlées vives, les martyres ont été les premières images à provoquer chez moi des émotions érotiques. [...] Ces fantasmes de viol, d'être prises de force, dans des conditions plus ou moins brutales [...] ne me viennent pas "out of the blue". C'est un dispositif culturel et prégnant et précis, qui prédestine la sexualité des femmes à jouir de leur propre impuissance, c'est-à-dire de la supériorité de l'autre, autant qu'à jouir conte leur gré, plutôt que comme des salopes qui aiment le sexe". C'est précisément en accolant "salopes" et "aiment le sexe" qu'elle parle comme un curé de campagne et c'est précisément en défendant les pratiques humilantes de la pornographie qu'elle prend le parti de ce qu'elle dénonce par ailleurs: l'auto-soumission masochiste des femmes. Une balle dans le pied et, encore une fois, une des plus curieuses façons que j'aie vu de militer pour la cause féministe.

Enfin, et pour en terminer avec cet article auquel je ne parviens pas à mettre un point final, je voudrais m'arrêter sur son interprétation de la scène qui a réuni Paris Hilton et Jamel Debbouze sur un plateau télé. Pour elle, le "Toi, je t'ai vue, je t'ai vue sur internet" qu'il lui a lancé en parlant des ses frasques sexuelles comme une façon de la réassigner à sa place de femelle n'aurait pas eu l'effet escompté ... trop riche, trop au-dessus de tout, et encore plus d'un type issu des classes pop, pour être déstabilisée. Zéro réaction, pas un sourcil levé de la part de Paris. Peut-être, il n'empêche que l'appartenance à son sexe lui a permis de l'invectiver à ce sujet. Quelle femme, même blindée de fric, peut en faire autant ? Jamel Debbouze, c'est celui qui évacue sa haine en traitant toutes les femmes de putes et de salopes, riches, pauvres, inaccessibles ou pas. Rien, jamais, ne l'empêche de dire "je t'ai vue à quatre pattes" et de mettre, c'est pathétique, les rieurs de son côté. Rien ne les empêche, et encore moins le rang social, de faire de notre sexualité un enjeu de domination, ils ont le lexique dans leur camp (pute, chienne ou salope). Sur le terrain de la pornographie, il y a une chose qui est indépassable à l'heure actuelle, c'est la vision tordue qu'ont la plupart des hommes de la sexualité et le coeur qu'ils mettent à en faire une guerre dont les femmes seraient les victimes, quelle que soit leur origine, leur compte en banque ou leur physique.

Le problème avec Despentes c'est qu'elle est beaucoup lue, justement parce qu'elle est beaucoup décriée, c'est pourquoi je trouvais nécessaire de remettre son propos en perspective, celle de l'intérêt personnel. Elle a fait son beurre sur la pornographie, elle a subvenu à ses besoins grâce à la prostitution. On ne crache pas dans la soupe ...

samedi 20 novembre 2010

La honte doit changer de camp

A l'occasion de la Journée MONDIALE contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre, le Collectif Osez Le Féminisme, le Collectif féministe contre le viol et Mix-Cité lancent une campagne nationale contre le viol. Toute personne qui souhaite s'impliquer dans sa région ou sa ville peut le faire en les contactant.

A partir du 24 novembre, seront disponibles sur le site Osez Le Féminisme :

- Le manifeste signé par les personnalités et la pétition qui sera mise en ligne
- L’affiche de la campagne
- La liste des personnalités signataires
- Un film de sensibilisation réalisé par Patric Jean et Frédérique Pollet Rouyer (en présence de la réalisatrice et du réalisateur)



Toutes les infos ici où vous trouverez le mail de contact.

mardi 16 novembre 2010

Violences faites aux femmes: le blog d'une docteure en traumatologie

J'ai découvert récemment le blog de Muriel Salmona, psychiatre-psychothérapeute en psychotraumatologie qui travaille sur LES violenceS faites aux femmes. Voilà l'une des rares praticiennes qui met son savoir au service de ce fléau et qui replace ce dernier dans le contexte de domination masculine: de l'exploitation domestique à la prostitution en passant par le sexisme ordinaire. Un billet a particulièrement retenu mon attention: fouillé, documenté, novateur par son approche pluri-dimensionnelle. Si le sujet vous intéresse, je vous invite chaleureusement à le consulter. Elle y expose les différents types de violences genrées, les causes (sans négliger la version sociologique), les mécanismes liés la violence autant chez l'agresseur que chez l'agressée ainsi que les pathologies et troubles associé.e.s aux traumatismes engendrés par ces violences.

Voici quelques extraits piochés dans l'introduction de l'article en question:


"Aucune femme, aucune fille dans le monde n'est à l'abri de subir des violences en raison de son sexe. A tout moment de leur vie, dans leur petite enfance, leur enfance, leur adolescence, à l'âge adulte ou pendant leur vieillesse, les femmes peuvent subir de mauvais traitements physiques ou moraux et des violences sexuelles. L'auteur des violences est majoritairement un homme, une personne connue de la victime, le plus souvent un proche. Aucun espace de vie des femmes et des filles n'est protégé. Et les espaces habituellement considérés comme les plus protecteurs - la famille, le couple - où amour, soins et sécurité devraient normalement régner, sont ceux où se produisent le plus de violences. Et ces violences les plus fréquentes sont aussi celles qui seront à l'origine des plus graves traumatismes psychiques et neurologiques. Toutes les violences entraînent chez les victimes des atteintes graves à leur intégrité physique et psychique. Cependant les violences familiale, les violences conjugales et les violences sexuelles font partie des violences les plus traumatisantes sur le psychisme. De 58 à 80 % des femmes victimes de ces violences développeront des troubles psychotraumatiques chroniques

Ces troubles psychotraumatiques peuvent durer des années, des dizaines d'années, voire toute une vie et ont un impact considérable sur la santé des victimes, la santé de leurs enfants, leur insertion sociale et professionnelle et leur qualité de vie. Ils représentent également un coût financier important pour les États.


Pourtant, en 2010, malgré leur fréquence et leur gravité, ces violences faites aux femmes font toujours l'objet d'une méconnaissance et d'une sous-estimation, au pire d'un déni ou d'une tolérance coupable. Elles font l'objet d'une véritable loi du silence. Cette loi du silence protège les agresseurs en leur assurant l'impunité, et elle protège également le mythe d’une société patriarcale idéale où les plus forts (les hommes et tout ceux qui détiennent une autorité) protégeraient ceux désignés comme étant les plus faibles ou les plus vulnérables (les femmes et les enfants). Surtout, cette loi du silence abandonne les victimes à leur sort, toutes les victimes.


Les violences faites aux femmes et aux filles englobent la violence physique, sexuelle et psychologique exercée au sein de la famille, au sein des relations intimes avec des partenaires, au sein de la collectivité, du travail et dans les espaces publics. Cet ensemble comporte aussi les mariages précoces, les mariages forcés, les violences liées à la dot, les crimes d'honneur, les mutilations sexuelles féminines et les autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la femme. Il faut y ajouter la violence liée à l'exploitation, le harcèlement sexuel et l'intimidation au travail, dans les établissements d'enseignement et ailleurs. En font également partie le proxénétisme, la prostitution et la violence perpétrée ou tolérée par l'Etat, et les crimes commis contre les femmes durant les conflits armés.

Les violences permettent à leurs auteurs d'alimenter maints stéréotypes qui confortent toutes les formes de domination, des hommes sur les femmes, des riches sur les pauvres, des puissants sur les faibles, stéréotypes qui, sans ces violences, auraient dû disparaître.

En 2010, la méconnaissance de la réalité de la violence faite aux femmes et aux filles, de ses conséquences à long terme sur leur santé, l'insuffisance des moyens mis en œuvre pour lutter contre elle, l'absence de prise en charge des victimes sont donc dues avant tout à l'ignorance des véritables causes de la violence, de ses effets et des mécanismes de sa reproduction. Cet état de fait est aggravé par les fausses représentations sur les violences et par des stéréotypes sexistes, qui font de la violence une fatalité, de l'homme un prédateur et de la femme un objet de consommation et d'instrumentalisation."










dimanche 14 novembre 2010

KKT: ni à prendre ni à laisser (1re partie)

King Kong Théorie de Virginie Despentes est un ouvrage que j'ai acheté dès sa sortie parce que la critique le présentait comme un essai féministe assez réussi. Je l'ai lu puis je l'ai laissé de côté, ses positions sur la prostitution et la pornographie étant mal étayées (j'y reviendrai). Le problème avec Despentes c'est que c'est une littéraire pas une essayiste, encore moins une scientifique, et que la rigueur, nécessaire en la matière, souffre de ce qui par ailleurs en fait une grande écrivaine.

Malgré tout et, surtout, malgré son soutien à OrelGland dans les pages des Inrocks, c'est une auteure que je ne parviens pas à dénigrer totalement et sur laquelle je n'ai jamais pu rien écrire tout en le regrettant. Et c'est une féministe que je tiens pour sincère même si je ne partage pas certaines de ses convictions. En effet, il y a en-dehors des deux problématiques citées plus haut, des choses très intéressantes dans ce livre et que je n'avais jamais lues ailleurs, notamment à propos du viol, qu'elle a personnellement vécu, et des tournantes. De plus, sa vision lucide et sans concession des bassesses de la virilité m'a immédiatement fait penser à Valérie Solanas. Peut-être parce que, comme elle, mâcher ses mots ne fait pas partie de son vocabulaire.

Ne pouvant me résoudre à rédiger un billet pour la descendre, ce qui aurait été malhonnête de ma part, pas plus qu'en écrire un pour l'encenser, ce qui aurait été déplacé, j'ai pris le parti d'écrire un billet "pour", celui-ci, et un billet "contre" à venir ou, pour reprendre une formule devenue incontournable, j'ai évité de jeter le bébé avec l'eau du bain. Risqué mais nécessaire à mes yeux.

Donc, parmi ce que je retiendrais de cet ouvrage, il y a ce qu'elle nous dit sur le viol, cette violence pour laquelle aucune ne se retourne contre son ou ses agresseur.s. Même pas elle qui possédait, ce jour-là, un cran d'arrêt aiguisé à la poche, même pas elle qui l'aurait sortie, cette lame, pour défendre son blouson, par contre. 

Pourquoi ? Parce qu'au fond elle a aimé ça, se faire violer (c'est d'ailleurs ce que se sont dit ses violeurs en découvrant le couteau ...) ? Non, parce qu'on nous apprend depuis toutes petites que "l'intégrité physique du corps d'un homme est plus importante que celle d'une femme". On ne se défend pas, on ne touche pas au corps des hommes, "les petites filles sont dressées pour ne jamais faire de mal aux hommes, et les femmes rappelées à l'ordre à chaque fois qu'elles dérogent à la règle." Ce qui les place dans la position la plus injuste qui soit: subir ce que la société considère comme parmi les atteintes les plus graves sans avoir le droit de s'en défendre, ni de s'en venger ... "Damoclès entre les cuisses" pour nous et le gage pour les hommes qu'ils sortiront grandis de cette histoire, ignorant "à quel point le dispositif d'émasculation des filles est imparable, à quel point tout est scrupuleusement organisé pour qu'ils triomphent sans risquer grand-chose, quand ils s'attaquent à des femmes." A ce titre, le viol n'est pas une agression sexuelle mais bien une manifestation paroxystique d'égo.s malade.s.

Les associations d'aide aux victimes permettent de se "reconstruire" (la bonne blague) après un viol, pas de s'y préparer. Nulle part, il n'a existé, il n'existe de groupes de femmes pour venger une soeur violée. Parce qu'il faudrait faire appel à la violence et à l'auto-défense et que ces modes de fonctionnement nous sont définitivement interdits.
Pourtant, pour elle et je ne suis pas loin de la rejoindre, "le jour où les hommes auront peur de se faire lacérer la bite à coups de cutter quand ils serrent une fille de force, ils sauront brusquement mieux contrôler leurs pulsions "masculines", et comprendre ce que "non" veut dire."
Se grouper, se mobiliser, puisque nous sommes TOUTES concernées, et envoyer des messages forts suffirait à mon sens: ne jamais sous-estimer la couardise virile.

La couardise virile, excellente articulation pour aborder les tournantes dont je livre ci-dessous la version Despentes. Quelle groupement d'êtres humains, à l'exception de la Mafia, est plus lâche qu'une poignée d'individus s'en prenant à une seule individue ?

Mais le propos de Virginie n'est pas là: pour elle, ces viols collectifs ne sont rien moins qu'une manifestation de l'amour que les hommes portent à leurs congénères, "On dirait qu'ils veulent se voir baiser, se regarder les bites les uns les autres, être ensemble en train de bander, on dirait qu'ils ont envie de se la mettre." A force de s'auto-persuader partout qu'ils sont les plus beaux les plus forts, les plus tout, ils finissent par le croire ... "Les hommes aiment les hommes." Elle va plus loin en les exhortant assez crûment: " ... qu'est-ce que [vous] attend[ez] pour [vous] enculer ? Allez-y. Si ça peut vous rendre plus souriants, c'est que c'est bien." Voilà vraiment le genre d'idée qui me vient à l'occasion, quand je n'en peux plus de les voir se masturber devant leur propre image, une idée que j'aurais pu écrire un jour, le talent littéraire et le langage abrupt en moins, mais que je n'avais jamais lue nulle part avant.

"Il se baisent à travers les femmes, beaucoup d'entre eux pensent déjà aux potes quand ils sont dans une chatte. Ils se regardent au cinéma, se donnent de beaux rôles, ils se trouvent puissants, fanfaronnent, n'en reviennent pas d'être aussi forts, beaux et courageux. Ils écrivent les uns pour les autres, ils se congratulent, ils se soutiennent." Franchement, on est en droit de se demander ce que la plupart d'entre eux fout avec nous ? "La peur d'être PD, l'obligation d'aimer les femmes " ??? Mais, allez-y sans crainte, j'ajoute mes encouragements à ceux de Virginie.

Voilà, il y aurait encore mille choses à relever dans ce livre somme toute assez court que j'ai aimé autant que détesté.

Peut-être parce que c'est avant tout une romancière, Despentes ne prend pas les précautions d'usage pour parler des rapports femmes/hommes ou, dit autrement, elle prend les libertés auxquelles une sociologue ou une philosophe n'a pas accès ou, du moins, ne s'autorise pas l'accès. C'est ce qui fait tout l'intérêt de cet ouvrage mais aussi sa faiblesse ...

jeudi 11 novembre 2010

Savoir digérer... pardon, rédiger

Déniché pour mes stagiaires, le "Savoir rédiger" de Larousse s'est révélé être une mine de sexisme ordinaire. Est-il utile de vous préciser qu'il s'agit de l'édition 2010 ? Que son auteur est un homme, que le féminin en est quasiment absent et que les prénoms à consonnance étrangère y sont carrément inexistants ?

En vert les phrases-exemples tirées de l'ouvrage, en rouge mes commentaires.

  • Dans le paragraphe consacré à l'adjectif épithète:
Un ridicule chapeau vert et rose; un adorable enfant blond.
Une mère adoptive comblée; un député socialiste combatif. (un choix sexiste et pathétique; un énorme androcentrisme fatigant)
  • Quelque part dans le chapitre sur la ponctuation:
J'ai offert un ours à Thomas et à Karine, une poupée. (phrase relevée uniquement pour stimuler votre inventivité à l'approche des fêtes)
  • Au sujet de l'emploi des pronoms personnels:
Louise pèle la pomme pour sa petite soeur. Elle la lui pèle. (parce que "Fernand pèle la pomme pour sa petite soeur. Il la lui pèle." ça ressemblait trop à un fantasme de féministe castratrice (peler une pomme pour sa soeur = chute inévitable des couilles))
  • Pour illustrer l'emploi du subjonctif dans les subordonnées:
Il se peut qu'elle ait tort. (mauvaise langue que je suis, il y a des phrases où le féminin fait des apparitions)
Ne crois pas qu'il te veuille du mal. (les hommes sont dangereux, on ne vous le répètera jamais assez)
Je ne suis pas sûrE que vous aimiez ma cuisine. (décidément, je n'avais pas réalisé que les femmes avaient aussi leur place dans ce manuel)
  • Dans un paragraphe intitulé "Ce que les mots veulent dire":
Cet homme est un vieux renard = un homme rusé, comme peuvent l'être les renards (métaphore).
Cette femme porte un renard = un manteau en peau de renard (métonymie). (tout commentaire serait superflu ici et revêtrait un caractère de (redondance) tant le propos est limpide)
  • Pour les néologismes:
(...) une vieille paricadelle ramiellée et foruse se hâtait vers la ville (...) La paricadelle excitée et quelques vieilles coquillardes, sales rides et mauvaises langues, achactées à tout, épiaient les retardataires. (Henri Michaux, Plume, 1930) (l'auteur est désolé et s'en explique: il s'agit là du seul extrait littéraire contenant des néologismes qu'il ait pu trouver)
  • Une illustration d'utilisation abusive des mots passe-partout (ici, l'adverbe très):
Cet homme est très grand, très riche, très célèbre. (et très entouré de très  très belles femmes très sexy)
  • Dans une mise en garde sur l'emploi des formules de politesse:
Attention: A une femme mariée, un homme présente ses sentiments respectueux ou ses hommages. Mais il n'est pas d'usage qu'une femme présente des "sentiments" à un homme: elle se contentera de salutations ou de son meilleur souvenir. (pour ma part, je me contenterai de vous les fourrer dans les trous du nez, vos usages à la noix)

lundi 8 novembre 2010

Permis d'exploiter

Spot radio, campagne contre les violences conjugales:


Lui: Mmmmh, ça sent bon, qu'est-ce que tu nous as cuisiné ?

Du bruit nous parvient en filigrane sonore, probablement une dispute entre les voisins du couple.

Elle: Des tomates à la provençale.

La conversation semble s'envenimer: Sale pute, bonne à rien, etc.

Lui: Tiens, elles ne sentent pas comme d'habitude, tu as mis du basilic ?

Grand fracas, cris, bris d'objets à côté, le voisin tabasse sa femme.

Le spot se termine sur une exhortation à signaler les violences conjugales dont nous serions témoins d'une manière ou d'une autre.

Bien. D'un côté un super mari, attentionné et tout, qui s'enquiert de savoir quel condiment vient modifier l'habituelle recette de sa dévouée petite femme, le bonheur conjugal quoi; de l'autre un gros salaud qui bastonne et insulte la sienne sans autre forme de procès (peut-être a-t-elle oublié, cette andouille, le basilic dont il raffole sur les tomates ...).

Voilà bien le genre de campagne dont les femmes se passeraient. Car sublimer et légitimer une violence, c'est-à-dire l'ignoble exploitation domestique qui précarise, surmène et use, pour en dénoncer une autre c'est nous faire croire qu'il y a des oppressions condamnables et d'autres qui sont emplies de bienveillance et de poésie. 

C'est couper le lien évident qui existe entre ces deux formes de violences de genre: les femmes au monde pour les hommes, peu importe leur utilité, exutoire ou bonniche.

Et surtout, c'est faire entrer dans nos cervelles de femmes, une bonne fois pour toutes, que nous sommes au service du mâle, comme ça, gratuitement, que c'est ça notre bonheur et que nous devons nous estimer heureuses d'avoir un compagnon tellement formidable et magnanime qu'il ne nous raye pas la gueule à chaque fois que nous modifions maladroitement, par oubli ou par audace, la recette des tomates à la provençale.

mercredi 3 novembre 2010

R.A.S

« Le sexe féminin a un caractère d’absence, de vide, de trou qui fait qu’il se trouve être moins désirable que le sexe masculin ... » Lacan.

Le sexe féminin, un trou; leur clitoris, un pénis atrophié; leur absence de vrai pénis, un affront dont les femmes ne se relevèraient jamais ... voilà la sentence. Circulez, y a rien à voir ! Mais enfin, de quoi souffrent ceux qui placent leur anatomie au centre de toutes les représentations ?

S'ils nous avaient écoutées, s'ils nous avaient simplement laissé parler, nous leur aurions dit que notre sexe, notre ventre sont pleins, entiers, palpitants,  vivent au rythme de cycles réguliers et sont potentiels de vie. Que jamais nous ne ressentons cette béance dont nous serions victimes. Qu'il nous convient bien comme ça, soudé, à l'abri, au chaud avec tout le matos qu'il faut pour jouir seule ou accompagnée. Que nous savons toutes que l'origine de chaque vie humaine se trouve précisément circonscrite là, même si l'on a décidé de ne jamais enfanter.

Quelle idée d'ailleurs de parler en notre nom ! Et c'est quoi cet acharnement à réduire notre sexe à un orifice ? Chez les psys, les prostitueurs, les pornographes et les pornophiles. Epilé, aseptisé, dématérialisé, anéanti, indésirable, béant, vacant, réduit à sa plus simple expression, plus de clitoris, de lèvres, d'utérus, un trou, du rien ... c'est trop, c'est louche, c'est quoi votre problème ?

Allongez-vous Monsieur Lacan.

Monsieur Freud, je vous fais patienter, je suis à vous dans un instant.

mercredi 27 octobre 2010

Politique de femmes

  "La politique c'est l'écologie au sens le plus large, et avec les femmes, toutes les femmes enfin délivrées des interdits qui les accablent. Le monde a besoin de femmes, des femmes entichées de vie, expertes en gestion du réel, plus enclines à produire, à partager qu'à prendre ou gagner, des femmes qui, pour avoir tenu bon si longtemps envers et contre tous les saccages virils, doivent savoir ce qui est bon, simplement bon, et comment on fait pour le protéger. Voilà ce que je pensais.

  Maintenant qu'on est au bord du désastre, je le pense bien plus fort encore. Ce qui inquiétait hier effraie aujourd'hui pour de bon. Désormais on ne peut plus se voiler la face. La course au profit, la lutte pour le pouvoir ont mis le feu aux poudres aux quatre coins de la planète, il n'y a jamais eu tant de pauvres, d'affamé.e.s, tant d'êtres hagards, hébétés, sans espoir ni perspective, tant de violences folles, absurdes, comme autant de suicides, ni non plus tant de riches éhontés et impudents, l'air, la terre, les eaux sont empoisonnées, d'ingérables tempêtes se déchaînent, on étouffe, on tombe malade, le nucléaire menace, l'angoisse gagne de tous les côtés quand la survie même de l'espèce apparaît compromise.La vieille politique des hommes ne parvient plus à cacher ses plaies, ses misères, ses saccages. [...]

  Si l'homme a un avenir, c'est maintenant, ici, tout de suite, et il passe par les femmes, qui s'y prennent autrement que les hommes, à la fois modestement et plus sûrement. Cela commence à se comprendre, à se vérifier, partout où elles s'unissent et retroussent leurs manches non pour quelque avenir radieux et définitivement assuré mais pour la tâche du jour, la justice, la protection de l'environnement, l'aide aux plus démuni.e.s, le partage, l'éducation, la santé. Elles ne tirent pas des plans sur la comète. Elles ne se paient pas de mots, de déclarations fracassantes. Elles vont au charbon. Elles s'informent, réfléchissent, négocient, et disent simplement ce qu'elles ont à dire. Elles travaillent, elles agissent. Elles aiment ça, agir, non pour se faire remarquer, mais pour que ça vive, que ça respire, que ça s'épanouisse, que ça se libère autour d'elles et grâce à elles.

  Franchement, en tout ce qui concerne la vie, sa protection et sa jouissance, je suis de plus en plus convaincue qu'elles s'y entendent mieux que les hommes.

  Sans doute parce qu'elles sont les premières à savoir qu'on n'est pas propriétaire de la vie, mais surtout parce qu'il a bien fallu tenir le coup de génération en génération, s'arranger, résister, ruser, endurer, et qu'elles ont plus d'un tour dans leur sac pour faire que ça continue malgré tout.

  C'est bien ce qu'on veut, que ça continue ?

  Oui, mais avec elles cette fois. Tout donne à penser, en effet, que ce sera mieux."


Annie Leclerc
décembre 2000

Extrait tiré de la préface de l'auteure à l'édition 2001 de "Parole de femme" (son ouvrage paru en 1974)

jeudi 14 octobre 2010

Hubertine Auclert



Les grèves, Marseille qui tient bon la lutte, les caissières du Monoprix (que les Marseillais.es de ma génération connaissaient sous le nom de Baze) qui expriment leur ras-le-bol, des femmes qui, de toutes parts, crient à l'injustice face à une réforme des retraites inique.

Marseille, des femmes en lutte, des grèves, des employé.e.s excédé.e.s, tout ça m'a rappelé ce billet sur Hubertine Auclert que je projetais d'écrire et pour lequel j'ai longtemps procrastiné.

Un billet pour raviver la mémoire de cette féministe remarquable et courageuse qui a tenu en octobre 1879 devant un parterre de plus de 1500 personnes un discours efficace et porteur lors du 3ème congrès ouvrier qui se tenait à Marseille.

Elle a tenu bon devant son auditoire, cette savante jeune femme qui réclamait pour le socialisme une dimension féministe, avançant ses arguments comme autant de pions dont on aurait calculé précisément la trajectoire sur un échiquier. Son discours pesé, mesuré, ciblé a fait mouche et l'égalité hommes-femmes a été votée peu après par le congrès.

Ne me demandez pas ce qu'en font aujourd'hui les héritier.e.s de ce parti, je n'en sais pas plus que vous ...

Ce jour-là, elle a secoué son auditoire, ne l'a pas ménagé, l'a mis face à ses bassesses et ses incohérences et malgré tout elle l'a emporté ! Je vous laisse juger sur pièce, à l'aide de morceaux piochés dans son discours, du style Hubertine Auclert:

"Savez-vous bien alors que vous nous permettrez de croire, à nous femmes, que vous avez moins le doute que la crainte de notre égalité."

"En continuant à nous laisser dans une vie atrophiante, vous imitez, vous hommes civilisés, les barbares, possesseurs d’esclaves, qui exploitent avec grand profit la prétendue infériorité de leurs semblables."

"Ou les femmes sont les égales des ouvriers et des bourgeois, ou les bourgeois, comme ils l’affirment, sont les supérieurs des ouvriers et des femmes.

"Finissez-en avec ces questions d’orgueil et d’égoïsme. Le droit de la femme ne vous ôte pas votre droit."

"« Chut ! … Ne perdons pas notre temps à nous occuper de ce détail ». Un détail ! L’exploitation d’une moitié de l’humanité par l’autre moitié ! "

"Il y a trop longtemps qu’on fait espérer aux femmes une condition sociale égale à celle de l’homme."

"Les femmes ont à se défier de ceux qui prônent l’égalité de l’avenir et qui, dans le présent, s’opposent à ce qu’elles apportent leur intelligence, leurs idées, leurs goûts dans l’arrangement de cette société future. Femmes de France, je vous le dis du haut de cette tribune. Ceux qui nient notre égalité, dans le présent, la nieront dans l’avenir."

"Citoyens, je le constate avec tristesse, vous qui vous dites les forts, vous qui faites un jeu de l’existence de celle que vous appelez les faibles. Que vous soyez riches, que vous soyez pauvres, vous exploitez les femmes."

"Nous voulons pour elles comme pour vous, l’instruction intégrale, les mêmes facilités de développement physique, moral, intellectuel, professionnel."

"O ! Prolétaires, si vous voulez être libres, cessez d’être injustes. Avec la science moderne, avec la conscience qui, elle, n’a pas de préjugés, dites : Egalité entre tous les hommes. Egalité entre les hommes et les femmes. Ascension de toute la race humaine, unie dans la justice, vers un avenir meilleur."


Le discours dans son intégralité.


Edit:  Son fameux discours s'est tenu un 22 octobre comme le Forum-débat qui se tiendra à Paris cette année: L'égalité entre les femmes et les hommes à l'épreuve des politiques publiques : la précarité des femmes à la trappe ?
Cette pure coïcidence a le mérite de révéler que l'institutionnalisation de la pauvreté caractéristique des femmes qu'Hubertine dénonçait il y a 131 ans est malheureusement toujours d'actualité.

Elle pour qui le changement devrait se faire de suite ou jamais ...

dimanche 10 octobre 2010

La Ligue des Droits de l'homme ...

... pas de la femme.

En écho aux billets d'Olympe et Emelire au sujet de l'affaire Sexion d'Assaut, à mon tour d'épingler comme elle le mérite La Ligue des Droits de l'homme (le h minuscule n'est pas une faute de frappe) qui condamne avec vigueur les textes homophobes du groupe à travers ce communiqué:


"Permettre la programmation d'un groupe qui tient des propos explicitement homophobes et appelant au meurtre et à la haine, revient à contribuer à la propagation d'une idéologie des plus dangereuses.


Il est inacceptable qu’en France, et donc à Strasbourg, soient programmés en concert des groupes qui clament publiquement leur haine d’une catégorie d’individus, et qui promeuvent une idéologie violemment discriminatoire.

Il revient à chacun, et notamment aux responsables de la Laiterie, où Sexion d’Assaut est programmé pour le 20 octobre, de prendre ses responsabilités et de veiller à ce que ne soient pas bafoués les principes et les lois de notre République.

La section strasbourgeoise de la Ligue des Droits de l’Homme s’oppose à la programmation de tels groupes et demande donc l’annulation de ce concert."


alors qu'il y a un peu plus d'un an, elle parlait en ces termes des textes d'Orelsan:

"Un artiste qui parle de désir de meurtre d’une femme? On raconte l’histoire effroyable de Barbe-bleue aux enfants. De la pornographie sadique ? Le marquis de Sade, qui a donné son nom à la chose, se montrait autrement inventif et raffiné en matière de pornographie et de violence, et ses livres figurent tranquillement sur les rayons des bibliothèques notre culture regorge de violences contre les femmes. Non seulement nous sommes opposés à toute censure en matière artistique (Olympe l'avait souligné avec justesse, j'en fais de même),  mais cette œuvre ne présente probablement pas de caractère illégal. "
 
La juxtaposition des textes parle d'elle-même et il suffit, en lisant le premier texte, de se remémorer l'affaire Orelsan pour se dire que La Ligue des Droits du Zhôm aurait pu tenir le même discours à l'époque.

Alors, c'est quoi le problème ? Le problème c'est qu'on n'a rien compris: dans la Ligue des Droits de l'homme, il y a l'homme pas la femme ... c'est pas pour rien.

vendredi 8 octobre 2010

Mobilisation contre l'homophobie affichée

A l'initiative du Collectif pour la condamnation de Sexion d'Assaut, une pétition circule que je vous invite à signer si l'homophobie vous révolte.

Dans la digne lignée d'un Orelsan, ce groupe fait son beurre sur la haine d'un groupe déjà bien amoché, au propre comme au figuré.

De plus, inutile de préciser que l'homophobie trouve sa source dans la misogynie et l'entretient.

Pour de plus amples informations sur l'affaire, voici le contenu de la lettre pétitionnaire:




A l'attention de Monsieur Jean-Claude Marin Procureur de la République TGI de Paris 14, quai des orfèvres, 75059 paris Cedex 01



Monsieur le Procureur de la République,


En interview comme dans de nombreuses chansons, le groupe SEXION D'ASSAUT tient des propos ouvertement homophobes et appelle à la haine et à la violence vis à vis des homosexuels...


Leur attitude et leurs déclarations sont condamnables dans la loi française.


Ces propos sont par ailleurs une véritable insulte à tous ceux qui luttent, quotidiennement, pour l'égalité des chances, contre le racisme et pour la diversité, dans le respect des lois françaises.


Ce groupe déclare ouvertement dans une interview (hip hop international N°10):


"Pendant un temps, on a beaucoup attaqué les homosexuels parce qu'on est homophobe à 100% et qu'on l'assume. Mais on nous a fait des réflexions et on s'est dit qu'il était mieux de ne plus trop en parler parce que ça pouvait nous porter préjudice "


« On ne peut pas se permettre de dire ouvertement que pour nous, le fait d’être homosexuel est un déviance qui n’est pas tolérable »


Dans un premier temps, le groupe dément avoir jamais tenu ces propos.


Puis devant la preuve audio amenée par la journaliste ayant fait l'interview et la montée d'indignation dans les médias, installe une autre politique de communication : l'un des membres du groupe est "désigné pour assumer'.


Celui-ci prétend alors 'ne pas connaitre la définition du mot homophobe et s'excuser'..., excuse qui ne trompe personne.


Il se trouve qu'à part cette interview, le groupe a déjà tenu, dans de précédents opus, de nombreux et véritables messages de haine ou d'appel à la violence envers les homosexuels:


«Je crois qu'il est grand temps que les pédés périssent, coupes leur le pénis, laisses les morts, retrouvés sur le périphérique» rappe Maître Gims dans le morceau 'On t'a humilié'.


«Lointaine est l'époque où les homos se maquaient en scred. Maintenant, se galochent en ville avec des sapes arc-en-ciel. Mais vas-y bouge, vas-y bouge. Toutes ces pratiques ne sont pas saines, Nos corps ne seront qu'un tas de cendres, la mort ne sera qu'une passerelle» (Morceau Cessez le feu – chanté par Maska).


« Moi je suis dégouté, faut m’écouter, y a à mon goût beaucoup trop de gays. » (Morceau l’œil de verre)


" Bien trop de Gay qui s'aiment en plus se marient " (morceau ‘Vous aussi’ - Maitre Gims)


"Tout comme ces deux fils de pute qui se dorlotent" (chanson album Renouveau - Black M)


" Ouais ce n'est que celui qui voit la fin parce que des hommes font du sexy au lit. Du sexe au lit ? Ouais négro : ce truc pas halal. "


Ce groupe devrait par ailleurs prochainement représenter la France aux MTV Music Awards ! !




PARCE QUE,


conformément à la loi française en la matière :


- je condamne ces propos homophobes


- je condamne l'incitation à la haine et à la violence vis à vis de personnes en raison de toute appartenance religieuse, ethnique ou basé sur leur orientations sexuelle


-je condamne la diffusion de tels propos,


-je refuse qu'un tel groupe représente la France, ses valeurs, dans une manifestation à caractère international




Je vous prie instamment, en vertu des pouvoirs qui sont les vôtres, de bien vouloir vous saisir de cette affaire au nom de la République française.




Cordialement

jeudi 7 octobre 2010

On arrête quand ?

Huit millions d'armes légères sont fabriquées chaque année dans le monde.

Elles tuent un millier de personnes par jour.



Source: le documentaire "Trafic d'armes: le commerce de la mort" rediffusé le 8/10 et le 14/10 sur Planète Doc.

samedi 2 octobre 2010

Enfermées

Je parcours aujourd'hui les blogs des copines et une évidence s'impose peu à peu à moi. Que ce soit dans des couvents, des gynécées ou des harems, des maisons closes ou des maisons tout court, les femmes sont enfermées depuis presque toujours pour servir un dieu, un maître, un violeur-prostitueur, un conjoint, un frère ... un homme en tous cas.

J'ai beau chercher, je ne trouve aucune structure équivalente qui aurait existé pour les hommes. Des hommes cloîtrés pour servir une femme.

La liberté physique des femmes effraie encore. On doit pouvoir les circonscrire et tout moyen justifie cette fin. Qu'on les renvoie, lasses de se battre, au foyer ou qu'on les dissuade de sortir en posant les jalons tacites d'un dehors dangereux, le dessein est le même.

Que fait d'autre un violeur-meurtrier de joggeuse que de signifier à sa victime et aux autres femmes que sa liberté de courir seule autour d'un lac lui est insupportable ? Que sa place est à l'intérieur, peu importe lequel, et qu'elle paye pour son audace.

Parce qu'un femme dehors, seule qui plus est, n'appartient qu'à elle-même. Et ça, c'est juste pas possible.

vendredi 1 octobre 2010

Parole aux philosophes

J'ai visionné une partie du documentaire "La cité du mâle" diffusé sur Arte et relevé, entre autres, les propos d'un jeune homme au sujet de la légitimité de la violence envers les femmes.

"Un homme ça reste un homme. Quand on parle de l'être humain, on dit l'homme, on dit pas la femme ... c'est pas pour rien."

Se rend-il compte sous les airs de philosophe érudit qu'il semble vouloir se donner:

- que l'utilisation du mot homme pour désigner les êtres humains n'est pas une vérité universelle, que c'est au contraire un dénigrement construit par des types au cerveau atrophié ... comme lui ?

- qu'il refuse, en 2010, le statut d'être humain à l'ensemble des femmes ?

- que son "c'est pas pour rien" cache à peine toutes les violences gratuites et multi-séculaires que les femmes subissent ?

Ceci dit, son propos a le mérite de mettre au jour le ressort de tout le machisme qui se joue dans notre société: les femmes ne font pas encore partie de l'humanité. Brimades, coups, objectivation, esclavagisation et humiliations à leur encontre ne sont que les applications méthodiques de ce postulat de base.

jeudi 23 septembre 2010

Ces yeux qui te regardent, et la nuit, et le jour

C'est le titre d'un recueil de textes diffusé par l'intermédiaire de Télérama à l'occasion du 23ème Festival du Livre de Mouans-Sartoux qui se déroulera cette année du 1er au 03 octobre 2010.

Le thème cette année: EtatS d'urgenceS.

Outre les contributions qui prennent aux tripes de Nadia Kaci (auteure de Laissées pour mortes-Hassi Messaoud) et Marie-Louise Gourdon, Françoise Héritier y parle de la violence sexuée à partir de son travail d'ethnologue:

" Lorsqu'on parle de la violence sexuelle, il n'est pas rare d'y voir associée l'idée de bestialité. En fait, c'est une erreur considérable. Ce n'est pas parce qu'ils sont proches des animaux que les hommes se rendent coupables de violences sexuelles.

Au contraire.

C'est la pensée, et seulement la pensée élaborée par nos ancêtres pour donner un sens au réel observé, qui est en cause, lorsqu'on examine de près les conditions de la violence sexuée, qu'elle soit publique ou privée.

Car de toutes les espèces animales répertoriées, il nous faut bien convenir que [l'être humain]* est la seule espèce où les mâles tuent les femelles."


* "l'homme" dans le texte originel, remplacé par mes soins par "l'être humain" pour plus de clarté.

mercredi 22 septembre 2010

Nausée matinale

Ce matin à la radio, les propos de Djamel Debbouze m'ont filé la nausée pour la journée:

Le journaliste: "Après « Indigènes » et « Hors-la-loi », vous songez à un autre film sous la direction de Rachid Bouchareb… "



Djamel Debbouze: "J’espère qu’on se retrouvera bientôt. Peut-être pour un porno halal !…" (Rires.)

Non. Pas rires pour ma part.

Sa réflexion et son engagement contre la haine des autres s'arrêtent chez ce comique, qui n'en a que le nom, où commence la haine des femmes.

Est-ce que c'est ça être intellectuellement limité ?

Septembre a inspiré l'OuLiPo

Repéré sur l'excellent site de l'OuLiPo :

 

Gnocchis de l'Automne

Cette année:

     le MLF a 40 ans
       l'Oulipo, 50
   le test de Turing, 60
    Rrose Selavy, 90.

On ne naît pas oulipien, on le devient.
Bientôt, un oulipien sur deux sera une femme.
Les oulipiennes ne sont pas des femmes.


Les trois derniers vers sont issus de citations célèbres, saurez-vous retrouver les citations originales ?

Les réponses dans un prochain billet au cas où.

vendredi 17 septembre 2010

Gynécide

On parlait il y a peu de la notion de gynécide. En fouillant dans mes archives, j'ai retrouvé ce texte de Micheline Carrier . En ce moment, j'ai un penchant pour celles qui appellent les choses par leur nom. D'aucuns disent probablement qu'elle exagère mais on sait bien ce que cette accusation cache ...

"Partout dans le monde et au sein de nombreuses ethnies, des femmes et des filles sont persécutées parce qu’elles sont des femmes et des filles, comme les Juifs l’ont été parce qu’ils sont juifs, comme les Croates l’ont été parce qu’ils sont croates, comme des gens de couleur l’ont été parce qu’ils sont de peau noire, jaune ou rouge.Les dictionnaires attribuent au terme génocide (n.m. du grec : genos « race » et suff.-cide : destruction, extermination) le sens de « destruction méthodique d’un groupe ethnique ». L’exemple qui nous vient tout de suite à l’esprit est celui des Juifs persécutés et exterminés par la haine des nazis.


Les peuples arméniens et croates ont également vécu une forme de génocide. Les Tutsis et les Hutus, à tour de rôle. Les Palestiniens également. En Amérique, on pourrait considérer que des ethnies amérindiennes ont également été victimes de génocide.


On peut trouver, dans l’histoire ancienne comme dans l’histoire moderne, des dizaines d’exemples de groupes qui en persécutent d’autres pour des motifs ethniques ou/et religieux.


Par extension, les dictionnaires définissent comme un génocide « toute extermination d’un groupe important de personnes en peu de temps. » Notez bien ceci : GROUPE IMPORTANT et EN PEU DE TEMPS.


Alors, lorsqu’il s’agit d’un groupe important de personnes persécutées et exécutées sur la seule base de leur sexe, il s’agit également d’un génocide. Aussi honteux pour l’humanité que soient l’Holocauste et toute autre forme d’extermination ethnique de toutes les époques, le pire génocide de l’histoire me semble ailleurs.


Il serait plus juste de lui donner le nom de GYNÉCIDE (gyne : du grec gunê, gunaïkos « femme ») ou de GYNOCIDE. Il s’agit de la « destruction méthodique » des femmes, qui se poursuit encore aujourd’hui dans plusieurs points du globe et de plusieurs façons.


Il arrive même que les peuples victimes des pires génocides se rendent eux-mêmes coupables de gynécides. Ils invoquent la Tradition. Tradition ou non, lors qu’on persécute ou détruit un groupe important, dans ce cas le groupe des femmes, cela reste une forme de génocide.


L’Histoire n’a jamais reconnu la responsabilité de l’humanité dans de nombreux gynécides. Le monde moderne n’est pas plus enclin à la reconnaître. Il pratique la dénégation systématique pour ne pas avoir à affronter sa honte et, surtout, ne pas avoir à changer de comportement et de valeurs. Car les enjeux sont importants. En tête de lice, comme toujours, les enjeux économiques.


PLUS DE VICTIMES


J’affirme néanmoins que les GYNÉCIDES dépassent en nombre et en sévérité tous les GÉNOCIDES qui ont pu être commis sur la planète Terre. Ils ont fait davantage de victimes. Si on voulait voir ce que des millions de femmes et de filles ont subi depuis des millénaires et ce que des millions de femmes et de filles subissent encore de nos jours, quotidiennement, si on voulait appeler les choses par leur nom, il faudrait reconnaître que les femmes EN TANT QUE GROUPE ont été victimes du pire génocide de l’histoire humaine. Dans certaines régions du monde, elles le sont encore avec la complicité de la communauté internationale qui prétend promouvoir les droits humains.


Le GYNÉCIDE, c’est-à-dire la persécution, la destruction ou l’extermination d’UN GROUPE IMPORTANT de femmes et de filles, pour les seuls motifs de dérogation au code moral, social ou religieux QUI LEUR EST IMPOSÉ EN RAISON DE LEUR SEXE, est un crime universel : il transcende les frontières des pays, des ethnies et des époques.


En effet, partout dans le monde, des millions de femmes de toute race sont séquestrées, exclues, chassées, persécutées, mutilées, violées, battues, torturées et exécutées DU FAIT QU’ELLES SONT DE SEXE FÉMININ. Crime « d’honneur », crime de guerre, crime conjugal, crime de la misogynie et du patriarcat, matricide, infanticide des filles, fratricide, etc. Les violences contre les femmes et les filles, dont la violence ultime, le meurtre, sont UNIVERSELLES.


Pourquoi ? À cause de la haine d’individus de l’autre sexe, comme certains groupes ethniques sont victimes de la haine d’individus d’autres groupes ethniques. Pas de tous les individus de l’autre sexe, évidemment, ni de tous les individus d’autres ethnies. Dans les deux cas, on agit au nom de motifs religieux, moraux, sociaux, culturels et politiques. Au nom de la Tradition. Une tradition qu’on préserve jalousement parce qu’elle donne à la domination sa légitimité. Qu’une société laisse des individus et des groupes en détruire d’autres révèle l’acceptation de ces génocides et de ces gynécides par celles et ceux qui se taisent. Une immense lâcheté collective."




Micheline Carrier-Juin 2002