lundi 5 novembre 2012

Des milliers de mots pour perpétuer le viriarcat

père
C'est le mari de la maman, sans lui la maman ne pourrait pas avoir d'enfants. C'est le chef de famille parce qu'il protège ses enfants et sa femme. On dit aussi papa.   

femme
C'est une maman, une mamie ou une jeune fille. Elle peut porter des bijoux, des jupes et des robes. Elle a de la poitrine.   
 
mariage
Quand on est adulte, on peut se marier avec son amoureuse, c'est quand le monsieur dit : « embrassez la mariée ».
 
 
Le mot sexe n'a pas été trouvé
 
Le mot homosexuel n'a pas été trouvé
 
Le mot divorce n'a pas été trouvé
 
...
 
Sexisme, conservatisme, natalisme, androcentrisme, le Dictionnaire des écoliers concoté par le CNDP (service de l'Education Nationale !) les propose allègrement aux enfants dès la grande section.
 
Voici le courrier que j'ai envoyé via le formulaire de contact. Si vous aussi êtes choqué.e, irrité.e, indigné.e par ce matériel qui flirte sans complexe avec la propagande viriarcale, vous pouvez vous en inspirer ou le copier intégralement.
 
Bonjour,
Je croyais être au XXIème siècle, je croyais que certaines notions rétrogrades et sexistes avaient disparu. Je ne pensais pas trouver sur un site de l'Education Nationale un dictionnaire en ligne destiné aux enfants qui véhicule une propagande misogyne et sexiste.
En effet, le Dictionnaire des écoliers disponible sur le site du CNDP (http://www.cndp.fr/dictionnaire-des-ecoliers/) propose des définitions pour le moins conservatrices et tout bonnement sexistes.

Au substantif père, par exemple, nous retrouvons la notion, officiellement obsolète depuis 1970, de chef de famille ... qui protège qui plus est (quand on sait que c'est au sein de la famille que sont subies des violences conjugales, familiales et sexuelles essentiellement exercées par des hommes, la formule est pour le moins cynique ...).

Quant à femme, il s'agit d'une maman, d'une mamie ou d'une jeune fille ... les femmes ayant passé la vingtaine sans avoir honoré leur devoir de maternité étant des êtres improbables. Mais cette vision réductrice ne s'arrête pas là puisqu'une femme est censée, toujours selon la définition qui en est donnée, porter bijoux, robes et avoir de la poitrine. A l'injonction d'une féminité strictement codée s'ajoute celle d'une masculinité privée de certains attributs ou accessoires.
Du côté du mariage, il s'agit de se marier avec son amoureusE, c'est quand le MONSIEUR dit : « embrassez LA mariéE ». Plus androcentré, y a pas. Si les petites filles ne comprennent pas qu'elles vivent dans un monde d'hommes, pensé par les hommes pour les hommes, elles ne le comprendront jamais. Sans compter l'amalgame amour/mariage qui nécessiterait un commentaire de dix pages à lui seul.
Enfin, les termes pourtant courants comme homosexuel (ne parlons même pas d'homosexuelLE !), sexe et divorce n'existent pas dans ce dictionnaire d'un autre temps.

Faut-il rappeler à des spécialistes de la pédagogie et de la langue que cette dernière modèle notre vision du monde ? Que le matériel pédagogique est soumis aux mêmes règles constitutionnelles que celles qui régissent l'ensemble de la société, à savoir l'égalité ? Que le sexisme et la misogynie sont contraires à la liberté et à la dignité des personnes ?
 
Apparemment, oui.

Edit du 05/11/2012: selon Les Nouvelles News, ce lexique serait "le fruit de l'imagination et du travail de milliers d'élèves [de maternelle et primaire] guidés par leurs maîtres." Ok, mais:

1- cette information n'est pas explicite et le dictionnaire s'appréhende comme un outil officiel ...
2- la vision de ces enfants en dit long sur leur précocité en matière d'assimilation des divisions sexuées ...
3- Cette même vision laisse deviner ce qui se dit à la maison ...
4- les encadrant.e.s de ce projet ont laissé passer et validé des définitions discriminantes et rétrogrades ...
 

samedi 25 août 2012

Nec deus nec dominus

Dans le cadre du projet d'abolition de la prostitution, Alternative Libertaire a rédigé un texte dans lequel elle maintient sa traditionnelle position abolitionniste mais questionne le volet de pénalisation du client sans toutefois avoir de position arrêtée sur le sujet.

Puisse ce billet, s'il est lu par les concerné.e.s ou celles et ceux que la question laisse perplexes, leur permettre d'appréhender la question autrement.

Idéologiquement libertaire, je partage la même aversion, la même méfiance pour le sécuritaire et le coercitif. J'en avais déjà parlé au sujet des prisons dans un vieux billet et ma réflexion était similaire à celle qui est exposée dans cet article de 2007 d'AL sur la Loi-cadre contre les violences de genre:

"...parce que punir un comportement encouragé par l’ensemble du fonctionnement social est quelque peu incohérent, particulièrement en s’appuyant sur un système carcéral d’une extrême violence, ne pouvant que pousser l’individu à reproduire cette violence (on en revient au point de l’impossible combat contre le système patriarcal par le système patriarcal lui-même). "
 
Les auteur.e.s y reconnaissent que "le volet répression est le plus difficile à défendre" et l'on ne peut que louer la cohérence de ce mouvement pacifiste, anti-répressif et pro-éducation.


MAIS ils, elles poursuivent ainsi:
"Cependant, nous vivons et luttons ici et maintenant, et c’est dans ce contexte qu’il faut rappeler que frapper ou violer est un crime, même s’il s’agit de sa compagne."
 

Le sous-titre  "Une urgence pour les victimes, un pas contre le système patriarcal" rappelle que l'urgence d'une situation nécessite parfois d'en appeler à la répression dans des situations où l'éducation a fait défaut et que la vie et l'intégrité de personnes est menacée ici et maintenant.

Concernant la prostitution, AL reconnaît pourtant qu'elle est "dans toutes ses formes génératrice de violence". Violence signifie urgence. Et violence signifie aussi violent.

Pourquoi alors protéger les auteurs de ces violences ?:

" Pour autant, nous ne pensons pas pouvoir en faire peser tout le poids sur les clients dont la morphologie sociale recouvre une réalité multiple."


Rappelons que celle des compagnons violents aussi ...

Rappelons aussi que les prostituées sont plus exposées que n'importe quel autre groupe social au viol, au meurtre, au décès précoce. Et que ce sont, la plupart du temps, les clients qui exercent ces violences.

Rappelons enfin qu'il s'agit de rapports sexuels non désirés donc contraints et que de facto cela s'apparente à un viol. Donc un délit.

C'est bien de la même oppression viriarcale, des mêmes conséquences désastreuses, fatales pour la vie de femmes, des mêmes violences que l'on parle.

Prostitution, phénomène oppressif à part qui ferait du prostitueur un oppresseur à part ?












dimanche 22 juillet 2012

Prostitution, pornographie, etc.




"Les outils du maître ne détruiront jamais la maison du maître"

Audre Lorde





... a fortiori quand ils sont suggérés par les maîtres eux-mêmes

dimanche 1 juillet 2012

Pourquoi je suis et reste abolo

Ca ne se fait pas en général de s'absenter longtemps sans donner de nouvelles. C'est pourtant ce que j'ai fait, veuillez m'en excuser. A ma décharge, une très très mauvaise passe comme il en arrive parfois dans une vie. Cela ne m'a pas empêchée de suivre l'actualité féministe.

Des déceptions comme l'acquittement d'Orelsan au procès qui l'opposait aux Ni Putes Ni Soumises au motif de la liberté d'expression, notion qui est règlementée en France  et trouve ses limites dans le respect de l'autre. Histoire d'affirmer que les femmes et les prostituées sont encore en-deça de l'altérité qui a au moins le mérite de valider une existence. Et dans la lignée cynique d'un machisme qui se repaît de sa légitimité, la présence conjointe aux Eurockéennes de Belfort de Bertrand Cantat et du gland sus-cité  ... Le praticien et son théoricien réunis. L'occasion peut-être pour Cantat de remercier Orelsan pour la perspective de voir un jour entrer dans le dictionnaire le grand-oeuvre de sa vie: maritrintigner, verbe du premier groupe signifiant rosser une femme de coups jusqu'à son décès au prétexte de la défense de l'honneur viril. Ca t'a quand même plus de gueule que conjugaloviolenter ou même féminicider. Bref.

Il y a eu aussi de bonnes surprises comme la détermination de Najat Vallaud-Belkacem à tenir bon sur l'abolition de la prostitution. Durant toutes ces années pendant lesquelles le sujet de la prostitution m'a mobilisée, où j'ai lu nombre d'arguments abolitionnistes et règlementaristes, j'aurais pu à l'instar de Crêpe Georgette retourner ma veste et virer défenseuse du commerce du sexe. Le seul argument qui aurait pu éventuellement avoir raison de mes convictions est justement celui qu'elle évoque: la prostitution permet à certaines migrantes d'assurer leur subsistance. Comme tous ces emplois sous-payés et pénibles qui leur échoient et qui relèvent essentiellement du domaine du care. Je rajouterais que les non-migrantes y sont confrontées également si l'on se rapporte au taux de 80% d'emplois précaires tenus par des femmes.

Sauf que la prostitution ne sera jamais un métier comme les autres, même légalisée le stigmate perdure car il est le moteur de la prostitution. Un stigmate si puissant qu'il en est devenu l'insulte la plus virulente. Et la plus nécéssaire: à qui d'autre qu'à une pute a-t-on l'autorisation tacite de faire subir des pratiques que l'on n'oserait, même en pensées, faire subir à toutes les autres.

Et sauf que c'est sur la pauvreté, notamment des femmes, qu'il faut agir et non sur la diversification des expressions de cette pauvreté. Bâtir une conviction sur un pis-aller (de la misère, il y en aura toujours) c'est céder au jeu des capitalistes cyniques. Bien sûr qu'il vaudra toujours mieux vendre son rein plutôt que de crever de faim mais est-ce pour autant qu'il faut institutionnaliser la pratique afin qu'elle se déroule dans des conditions sanitaires optimales ? Est-ce que l'enjeu premier, celui que nous ne devons pas perdre de vue, n'est pas que plus personne n'ait à vendre son cul, ses yeux ou son foie pour manger ? Dans la négative, nous asseyons la misère en légitimant ses palliatifs.

Bebertnorbert l'a bien compris, la pauvreté de ces femmes lui permet de faire des économies sur le dentifrice et de continuer à baffrer de la viande bien grasse:


" En plus, on leur rend service sinon elles crèveraient de faim dans leur pays.
Et même si elles sont pas d'accord au départ, et bien elles s'y font. Mieux que de crever de faim, non ? Au départ, c'est quand meme des crevardes et on leur donne une chance de survie.
Aucune femme non tarifée ne veut de moi, alors j'en viole une dans la rue ? Le porno, ça me suffit pas je veux du frais.
Les gros moches qui sentent de la bouche ont aussi le droit de niquer !"


Manger à sa faim sans avoir à subir un fist-fucking et ses conséquences est un droit, c'est celui pour lequel nous devons nous battre. Celui de niquer est une invention masculine que la légalisation de la prostitution entérine. La privation de nourriture conduit à la mort, la privation de sexe à la frustration. Or, la résistance à la frustration est une question d'éducation.

Une éducation qui en finirait avec la notion de virilité qui encourage l'appropriation forcée des femmes et le déni de leur consentement. Viol ou prostitution:

"Si la ministre désire ici aider les femmes en établissant le client comme bouc-émissaire, c’est finalement l’homme qui est ici visé, car derrière l’homme, on voit le client et le violeur. C’est comme si l’on souhaitait qu’il soit asexué." Sylvain Mimoun.
Que "l'homme" soit asexué, qu'on lui refuse le viol et la prostitution, seules voies manifestement de sa mâle identité, rien à faire. Je suis et reste abolo.






















vendredi 11 mai 2012

L'énigme de la femme active (et souffrante)

Celles et ceux qui me connaissent un peu savent que je me méfie des psys et de leurs dogmes essentialistes autant que d'un article progressiste dans Libé. Rien donc n'aurait dû me pousser à emprunter cet ouvrage écrit par une docteure en psychologie, Pascale Molinier, et encore moins son titre, "L'énigme de la femme active" ... Pourtant, je l'ai malgré tout présenté à l'agente en charge des emprunts de la médiathèque - on fait des trucs de ouf parfois - prête à dénoncer ici-même s'il le fallait les arguments pro-ordre hétérosexiste que j'étais persuadée d'y trouver.

Déjà embarquée dans mes certitudes que le féminisme est si marginal qu'une médiathèque de petite ville (du Sud-Est qui plus est, cf. les résultats de l'élection présidentielle dans cette région) ne peut proposer que du "Pourquoi les femmes ne pètent jamais et les hommes sont poilus", je n'ai pas compris le sous-titre "Egoïsme, sexe et compassion". Perdue, j'étais.

Pourtant, il ne m'a fallu que quelques pages, deux citations (Delphy et Mathieu) et trois respirations avec le ventre en vue de me relaxer pour comprendre que je tenais là les écrits d'une psy ouvertement féministe. Egoïsme pour les uns, compassion pour les autrEs sont les deux versants d'une éducation sexuée que pas grand monde n'est prêt à remettre en question tant la disponibilité sacrificielle des unEs arrangent les autres. Voilà dans les grandes lignes la teneur du propos. Et pour l'application, Molinier s'est penchée sur le monde du travail, plus particulièrement sur les infirmières et les stratégies qu'elles mettent en place pour pallier l'usante et quotidienne confrontation à la souffrance voire la déchéance humaines.

Un bon livre n'enfonce pas des portes ouvertes et c'est le cas. Dès le premier chapitre, une réflexion sur le traitement médiatique de la souffrance liée au travail selon le sexe surprend et fait cogiter:

"Dans l'archipel des conditions malheureuses, il en est de plus en vue que d'autres. La souffrance des hommes inquiète, dérange, interpelle. Celle des hommes pauvres justifie qu'on multiplie les "observatoires", tant sont redoutées ces flambées sporadiques dans la rage et le saccage.[...] Quant à la souffrance des hommes dominants, ce n'est rien de dire qu'elle fait recette ! Qu'on me pardonne ces trivialités, mais "le stress des cadres" a fait couler plus d'encre ces dernières années que celui des caissières d'hypermarché. 
[...]
Que les souffrances féminines soient perçues et vécues sur le plan du drame personnel et qu'elles ne soient pas contextualisées dans la perspective d'une crise identitaire collective, cela ne doit pas nous étonner. Parce que la souffrance est déjà contenue dans la définition de la "nature féminine", quelle que soit la connaissance que nous ayons, par ailleurs, des discriminations fondées sur l'arbitraire du sexe, il demeure que la souffrance des femmes est moins immédiatement saississable que celle des hommes en termes de causalité et d'injustice sociales.
[...]
Dans cette souffrance, nous entendons d'abord, et essentiellement, un problème de psychologie individuelle plutôt que l'écho singulier d'un drame pluriel."

La première chose qui frappe c'est cette constante selon laquelle tout ce qui arrive aux femmes est intrinsèque à leur nature vulnérable quand n'est pas instillée l'idée qu'elle sont les premières coupables de leur sort. Les femmes sont censées vivre des drames personnels même dans le cadre du travail qui s'inscrit par essence dans les problématiques de société ! Les violences conjugales, le viol ou l'exploitation domestique sont de la même façon sorties du cadre du phénomène social collectif. On ne sait jamais, des fois qu'il y aurait des solutions à trouver  ...

Ensuite, il y a cette psychologisation abusive de la souffrance des femmes. J'en avais parlé dans un vieux billet, "Femmes et santé mentale", le processus permet de fragiliser plus encore les femmes ainsi dotées d'une psyché naturellement bancale et de faire fi des conditions de vie honteuses dans lesquelles le système oppresseur les maintient. Le bénéfice est double, qui, soucieux de maintenir sa supériorité en créant l'infériorité de l'autre, s'en priverait ?

Dire que les femmes ont un sacré mental, constituant 80% des travailleur.e.s pauvrEs, l'essentiel du personnel des métiers improductifs (mais nécessaires), difficiles et sous-rémunérés et l'unique ressource gratuite du travail domestique, n'est pas une vue de l'esprit. Une triple peine (précarité, pénibilité, exploitation) qui ne mobilise que les vendeurs de palliatifs (magnésium, anti-dépresseurs, torchons ou bouquins pour concilier vies personnelle et professionnelle, etc.) et jamais les grands dossiers sur la souffrance au travail. 

Probablement parce que la souffrance des femmes fait partie d'un éternel féminin auquel le renoncement conduit à une réelle émancipation. La beauté de la vertu, souffrir en silence, est censée transformer ses ravages en dommages collatéraux inévitables et indispensables. Et si féminins. Pour un peu, certains en feraient, ultime argument du moment, un truc glamour et sexy.
Ah! c'est déjà fait ? Au temps pour moi.





samedi 28 avril 2012

Petit cadeau

Petit coup de mou en ce moment, alors voici un petit post avec un petit cadeau pour remercier Euterpe pour son remarquable travail sur les héroïnes et anti-héroïnes bousillées par Walt Disney et faire un pied-de-nez à la culture hétéro-sexiste qui nous vend des princes charmants dont on n'a que faire:





mercredi 11 avril 2012

" Je veux une gouine comme présidente "

L'artiste américaine Zoé Leonard a écrit ce texte en 1992, il a été repris par le collectif suédois I want a president puis librement traduit en France par le groupe d'action Je veux unE présidentE :

"Je veux une gouine comme Présidente. Je veux qu’elle ait le sida, je veux que le Premier ministre soit une tapette qui n’a pas la sécu, qu’il ait grandi quelque part où le sol est tellement plein de déchets toxiques qu’il n’a aucune chance d’échapper à la leucémie. Je veux une présidente de la République qui a avorté à 16 ans, une candidate qui ne soit pas la moindre des deux maux ; je veux une présidente de la République dont la dernière amante est morte du sida, dont l’image la hante à chaque fois qu’elle ferme les yeux, qui a pris son amante dans ses bras tout en sachant que les médecins la condamnent.

Je veux une présidente de la République qui vit sans clim, qui a fait la queue à l’hôpital, à la CAF et au Pôle Emploi, qui a été chômeuse, licenciée économique, harcelée sexuellement, tabassée à cause de son homosexualité, et expulsée. Je veux quelqu’une qui a passé la nuit au trou, chez qui on a fait brûler une croix et qui a survécu à un viol. Je veux qu’elle ait été amoureuse et blessée, qu’elle ait du respect pour le sexe, qu’elle ait fait des erreurs et en ait tiré des leçons.

Je veux que le président de la République soit une femme noire. Je veux qu’elle ait des dents pourries et un sacré caractère, qu’elle ait déjà goûté à à cette infâme bouffe d’hôpital, qu’elle soit trans, qu’elle se soit droguée et désintoxiquée. Je veux qu’elle ait pratiqué la désobéissance civile. Et je veux savoir pourquoi ce que je demande n’est pas possible; pourquoi on nous a fait gober qu’un président est toujours une marionnette: toujours un micheton et jamais une pute. Toujours un patron et jamais un travailleur. Toujours menteur, toujours voleur, et jamais puni.»


Photo Dana Wyse

mardi 3 avril 2012

Appellation d'Origine Lesbienne inContrôlable

C'est ainsi que se définit elle-même La p'tite Blan, auteure de BD lesbiennes !

Après Coming soon:



et Coming out:




voici Coming back :



Le propos est cynique, hétérosexocritique et résolument politique, le trait est signé Galou. Voilà une lesbienne qui en a ... des choses à dire.

Elle tient d'ailleurs un blog à la langue bien pendue que je vous recommande chaudement.




jeudi 29 mars 2012

Attention ! Espace féministe protégé

Ce blog a reçu récemment des commentaires de masculinistes. Alors, avant de dresser un bref portrait de ces hommes (et quelques femmes), de leur démarche et de leurs stratégies, je voulais préciser que je ne publierai plus leurs interventions.

Je tiens à ce que ce lieu reste un espace pour militer, s'informer, échanger et réfléchir sur des bases féministes et pro-féministes, libertaires et anti-violence. Et ce ne sont pas les intimidations retorses qui me feront taire ! Je suis convaincue du bien-fondé et de la cohérence de ma démarche, que celles et ceux qui ne partagent pas mes positions aillent donc parler suppression du droit à l'avortement, maintien des rôles traditionnels et inégalitaires, déni des violences sexospécifiques ou protection des pauvres hommes victimes des femmes et du féminisme AILLEURS.

Les masculinistes ne sont pas encore très connus en France, ils n'en sont pas moins présents et actifs. Il y a un masculinisme "officiel" avec des théories et des structures d'appui (comme SOSpapa) et un masculinisme plus informel et latent (les oppositions grossières et virulentes aux actions féministes en font partie).

Comme on peut le lire sur la page Wikipédia qui ne s'en sort pas sur la définition, certains voudraient faire du masculinisme le pendant symétrique du féminisme, soit "le combat mené par des hommes pour obtenir les mêmes droits que les femmes" ... (sic).

Encore faudrait-il que la condition masculine soit source de discriminations avérées et mesurées et que les perspectives de changement envisagées soient égalitaires pour faire état d'une quelconque symétrie. Et pourquoi pas "Pour que les riches aient les mêmes droits que les pauvres", hein ?

Qu'à cela ne tienne, les hommes seront aussi des victimes:

- des femmes et du système judiciaire qui laisserait trop souvent la garde ... à celles qui ont l'habitude de s'en occuper
- des féministes qui seraient allées trop loin, inversant les rapports de pouvoir (la phobie projective n'étant jamais loin)
- d'un statut dévalorisé: les moindres avancées, les infimes réhabilitations des femmes étant perçues comme des affronts insoutenables
- de violences au même titre et dans les mêmes proportions que les femmes
- d'échec scolaire en raison de la féminisation abusive du métier d'enseignant.e
- des demandes de divorce exagérées au regard du droit à la propriété privée (même problématique qu'avec les enfants)

Oui, mais comment faire passer ces élucubrations pour la réalité ? :

- en trafiquant les chiffres sur la violence
- en faisant passer la lutte contre les violences masculines pour un complot anti-hommes
- en présentant le masculinisme comme un humanisme
- en inventant des syndromes comme le SAP (Syndrome d'Aliénation Parentale)
- en occupant le champ médiatique alors qu'ils ne sont qu'une poignée

Quel est donc l'objectif réel de ces hommes ?

- entraver les avancées de la condition des femmes qui les font vraiment trop souffrir (argument immanquablement appuyé par le taux de suicide masculin)
- revenir à des modèles traditionnels (femme à la maison élevant LEUR progéniture mais tenue de la leur rendre en cas de divorce)
- supprimer le droit à l'avortement qui dote les femmes d'un libre-arbitre intolérable
- soutenir le caractère naturel et donc inéluctable de la virilité et de ses manifestations, dont la violence, chez les hommes
- maintenir des privilèges fondés sur l'arbitraire et sur l'exploitation, la maltraitance et l'infériorisation des femmes

Bref, des idées peu défendables aujourd'hui et de surcroît ici.

Edit: Comme je m'en doutais, je suis taxée de mensonge et de paranoïa. Le mieux est d'écouter leur conception de l'humanisme et de l'égalité (propos recueillis par Patric Jean):

A propos des femmes et des hommes:
http://vimeo.com/6794502

A propos de la violence conjugale:
http://vimeo.com/6792916

A propos du viol, de la pédophilie et de l'inceste:
http://vimeo.com/6798221
A propos des féministes façon point Godwin:
http://vimeo.com/6797283

samedi 24 mars 2012

Cher Bernard D. de Valenciennes

Comme Télérama, auquel vous avez adressé un puant "courrier des lecteurs", ne publiera probablement pas la réponse que je comptais vous faire pour des raisons que je supposerai plus bas, je vous propose de lire ci-dessous, si vous passez un jour par là, les réflexions qu'il a suscitées chez moi.

En effet, vous dites: "Cher(e ?) Dominique, vous vous étonnez, dans un récent courriel envoyé à Télérama, qu'un article du même journal ait parlé des militant(e)s et non des militant-e-s, orthographe sonnant plus "égalitaire" selon vous. Permettez-moi au nom des féminines parenthèses, de m'insurger contre le soupçon d'infériorité que vous leur prêtez par rapport aux masculins tirets. Ce n'est pas très égalitaire tout ça, hum ! Permettez-moi aussi de vous dire que c'est avec ce genre de débats stupides que les féminist(e)s passent, au mieux pour des emmerdeurs(euses), au pire pour des con(ne)s, non, pardon ... con-ne-s (ça sonne plus égalitaire). Bernard D., un vrai féminist (sans E, ça sonne plus masculin) Valenciennes."

Cette pauvre Dominique, je m'en souviens effectivement, avait suggéré l'utilisation de ce qu'on appelle la typographie légère. Et quand Dominique suggère vous vous insurgez et hurlez au débat "stupide". Si "stupide" que vous lui avez consacré aussi de votre temps ... Le mystère du droit à la stupidité doit être certainement lié au sexe auquel on appartient.

D'ailleurs, ce à quoi les féministes consacrent leur temps est étroitement surveillé. Elles auraient toujours mieux à faire même quand elles parlent de sujets tels que le viol ou la violence conjugale. Mieux à faire, c'est étrangement toujours synonyme de s'occuper des femmes afghannes, par exemple ... c'est-à-dire ailleurs. C'est-à-dire dans des pays que vous n'habitez pas.

J'aimerais également vous faire remarquer la bêtise de votre observation concernant le genre des parenthèses et des tirets. L'Académie Française, bien qu'étant de genre féminin, a toujours été remplie d'hommes. Le féminin d'un nom n'a jamais été gage du respect de la parité chez le signifié auquel il renvoie. L'Assemblée Nationale, la Cour Constitutionnelle, une élection présidentielle, etc.

Je vous avoue, je me suis demandé pourquoi Télérama avait publié un courrier aussi réactionnaire et injurieux que le vôtre. Plusieurs hypothèses ont germé: montrer à quel point un antiféministe primaire peut être grossier et malhonnête quand il voit son petit monde bien rangé (avec ses femmes bouclées entre parenthèses) vaciller ou bien illustrer le fait qu'il s'agissait du dernier numéro d'une version dépassée de l'hebdomadaire qui disparaîtra la semaine prochaine (nouveau look, nouveaux concepts, nouveaux sujets, nous apprend le magazine ... nouveaux commentateurs aussi, ce serait pas mal) ou encore signifier aux lectrices et lecteurs que la rédaction tiendra bon sur la typographie lourde qu'elle a utilisée jusqu'ici malgré les nombreuses sollicitations, dont la mienne il y a un an environ.

Dommage, car ces signes typographique comme le tiret (et, horreur, le point voire l'espace), au-delà de l'esthétique égalitaire qu'ils façonnent, facilitent considérablement la lecture une fois acceptés. Mais là ne se situe sûrement pas votre problème. A vrai dire, on a du mal à saisir ce qui vous gêne autant pour ajouter aux classiques "hystériques", "aigries" et "mal-baisées", les cinglants "emmerdeuses" et "connes".
Bernard, dites-moi sérieusement, en tant que "vrai féminist" (!), vous n'avez rien de moins stupide (et méchant) à faire que d'insulter des "fausses féministes" pour une revendication qui ne tuera personne- pas même la langue - et qui est déjà utilisée, ne vous en déplaise, ici et même ailleurs ?

PS: rassurez-vous quand même, vous n'êtes pas le seul à nous invectiver sur nos choix de lutte et nous sommes plutôt habituées à vos arguments et insurrections démesurées qui commencent  sérieusement à sentir le rance.
Ma co-idéologiste du Journal en noir et blanc en parlait justement la semaine dernière.

jeudi 22 mars 2012

Allez les filles

Il suffit de faire une recherche basique sur les citations et proverbes qui ont pour mot-clé le mot "fille" pour mesurer à quel point le mépris affiché envers ce membre de la famille est vivace.

De "Faites faire des études à vos filles. Comme ça, plus tard, elles pourront penser en passant l'aspirateur" (Régis Hauser) à  "Nourrir les filles, c'est engraisser des vaches dont on n'aura jamais le lait" (proverbe sénégalais) en passant par le pathétique "S'il y en a qui ont dix-huit filles, ils ont un terrain de golf" (Christophe Dechavanne) les manifestations de haine sont légion et avoir une fille semble se résumer au mieux à une opportunité (parfois perdue) et au pire à une calamité voire une honte. Quant il ne s'agit pas tout naturellement de rappeler qu'une fille appartient à son père.

J'ai trouvé mille façons de dire qu'avoir une fille ne valait pas grand chose... et rien sur la joie, la satisfaction ou encore la fierté que cela pouvait procurer.

Les pères sont souvent déçus de n'avoir pas eu de fils (ou de n'avoir eu que des filles, c'est pareil). On sent bien derrière ces familles à 4 ou 5 filles qu'un père a usé une mère pour avoir LE fils qui n'est jamais venu. Moi qui ai deux filles, je me suis souvent entendu demander par des personnes aussi différentes qu'intrusives quand je me déciderai à avoir un garçon ... A l'inverse, l'une de mes amies s'est vu refuser par son compagnon le second enfant qu'elle désirait au prétexte qu'il avait déjà eu, avec le premier, le fils qu'il voulait, SON fils.

Quand son ventre fut rond
En riant aux éclats
Elle me dit allons jubile
Ce sera un garçon
Et te voilà
Cécile ma fille ... aïe !

Il n'a pas eu SON fils ...

"Tel père, tel fils", le grand fantasme, fait d'ailleurs écho à l'insistance de certaines personnes à trouver des ressemblances entre un père et son (ses) fils malgré des évidences parfois frappantes. Un exemple célèbre: Thomas Dutronc, dont on aurait du mal à faire le rapprochement avec son père si le nom de famille ne venait à notre secours, n'a rien, contrairement à ce que l'on peut entendre et lire partout, des attitudes, des traits ou même de la façon de faire de la musique qu'a son géniteur. D'ailleurs, en parlant de géniteur, l'ironie du sort qui est parfois mordante révèle de temps en temps que des fils dont on nous a rebattu les oreilles avec les similitudes en tous points avec leur père ne sont finalement pas les fils de leur père ... 

Bref, ce constat jure tristement avec le désintérêt réservé aux filles. Mais, parmi la multitude de phrases odieuses et méprisantes sur les filles, parmi les déceptions à peine voilées (parfois même la rage) qui entourent la naissance des filles, j'ai déniché cette exception:


" J'avais une fille. Je débordais de fierté. Une fille. Le plus cadeau que la vie puisse faire à un homme."
Jean-Paul Dubois dans Une vie française.
Pour parfaire cette modeste réhabilitation, je rajouterais "à une femme aussi" car "Une maison sans fille est une maison morte".








 

samedi 17 mars 2012

Les mots justes (2ème partie)

Encore Nicole-Claude Mathieu qui a été la première à employer le terme de viriarcat qu'elle préférait à celui de patriarcat et qui signifie:

«  ... le pouvoir des hommes, qu’ils soient ou non pères, que les sociétés soient patrilinéaires ou non. »

Construit à partir de la racine vir-, le mot permet à mon sens deux lectures correspondant à deux phénomènes interdépendants: le pouvoir de toute personne de sexe masculin mais aussi, et plus largement, celui du masculin, porté par un homme ou non, dans la société.

Le terme viriarcat permet une représentation plus réaliste des mécanismes à l'oeuvre: là où le patriarcat a tendance à réduire l'oppression à des situations de pouvoir (père, chef, maître), le viriarcat reprend la réalité selon laquelle un fils, un élève, un patient, un cousin, un frère, un conjoint ou un collègue peuvent aussi exercer des violences oppressives en dépit du rapport de pouvoir ou d'égalité dans lequel elles s'inscrivent.

D'autre part, et c'est là la deuxième acception que l'on peut dégager, le mot viriarcat souligne la toute-puissance de la culture masculine qui fonde nos sociétés au point qu'elle en est devenue une culture universelle (quand celle que partagent les femmes est celle de l'altérité). Par viriarcat, on peut également entendre, par extension, tout système fonctionnant sur des valeurs masculines: compétition, conquête, appropriation et hiérarchisation.

Le patriarcat, selon cette nouvelle terminologie, ne serait qu'une des formes du viriarcat et s'il a été laissé pour mort dans les années 70 ce n'est que pour laisser aux observatrices, chercheuses et féministes l'opportunité d'entrevoir l'étendue du phénomène.*


* ce néologisme a d'ailleurs été utilisé par Nicole-Claude Mathieu en 1974.

vendredi 9 mars 2012

Le 8 mars en léger différé

J'ai reçu, par l'intermédiaire d'une liste de diffusion féministe (dont je vais me désabonner), un appel à manifester aux côtés des associations féministes provenant du mouvement pro-prostitution. Le voici dans son intégralité suivi des quelques refléxions auxquelles il m'a amenée:


8 mars: pour TOUTES !
            
Le 8 mars sera une journée de lutte et de solidarité pour les droits
des femmes, de toutes les femmes. Dans cette période de crise aigüe,les attaques touchent particulièrement les femmes dans le monde entier. Nous sommes solidaires des femmes en lutte en Grèce, en Espagne, au Portugal comme en Egypte, en Tunisie et dans tous les pays. En France nous sommes aux côtés des salariées de Lejaby et de toutes celles qui se battent pour leur emploi et leurs conditions de travail, de celles qui se battent contre la précarité et contre le démantèlement des services publics.



       Dans un climat de renforcement de l'ordre moral nous défendons un


       féminisme non-excluant, nous voulons donner la parole à toutes les
femmes dans toute leur diversité. Nous sommes ainsi solidaires des
femmes sans-papiers en lutte pour obtenir leur régularisation, des
gouines pour l'égalité des droits, des trans contre la discrimination,
des assistantes maternelles et des mères musulmanes empêchées de travailler ou d'accompagner les enfants, des putes en lutte contre la pénalisation des clients.




Nous exigeons :


- l'égalité salariale avec rattrapage immédiat
- l'abrogation de la loi HPST et la défense du service public sur la
santé des femmes (maternités, IVG...)
- de véritables services publics de la petite enfance au quatrième âge afin que les femmes ne soient plus obligées d'en assurer la prise en charge
- l'évolution de la loi du 9 juillet 2010 sur les violences vers une
véritable loi cadre contre les violences faites aux femmes élaborée en concertation avec toutes les organisations concernées
- la régularisation des sans-papières et un véritable accès aux droits
pour toutes les femmes quelles que soient leur situation et leur
origine
- un ministère des droits des femmes avec des moyens conséquents
- le droit d'asile pour les femmes cibles de persécutions et de violences sexistes, lesbophobes et transphobes
- l'abrogation du délit de racolage public et la lutte contre les
politiques actuelles et celles qui nous sont proposées qui ne visent qu'à pénaliser davantage les prostituéEs avec les mêmes conséquences que la LSI de 2003, leur mise en danger, leur stigmatisation au détriment d'une lutte effective contre les réseaux de proxénètes et leurs profits
- la fin des discriminations racistes et xénophobes héritées de l'idéologie coloniale qui touchent en premier lieu les femmes
- l'arrêt de l'instrumentalisation de la laïcité à des fins racistes et sexistes
- la démission des élus auteurs de violences sexistes
- le fin de toutes les mesures médico-juridiques imposées aux trans et des discriminations liées à l'identité de genre
- l'égalité des droits pour les couples de même sexe (mariage, adoption...)
- la construction et l'accessibilité au logement pour les femmes, en
particulier les femmes à faibles revenus et les femmes victimes de
violences conjugales
- une approche débarrassée des stéréotypes sexistes et hétéronormés de l'éducation à la sexualité, des droits sociaux et de la santé et ce dès la crèche


Premiers signataires


Acceptess, Act Up-Paris, Afrique Avenir, ANA (Avec Nos AinéEs), Aides, Arap Rubis, Autres Regards, Cabiria, Collectif Droits & Prostitution, Collectif Tirésias, Etudions Gayment, Fédération LGBT, Fédération Syndicale Etudiante (FSE), Fédération Total Respect - Tjenbé Rèd (Fédération de lutte contre les racismes, les homophobies et le sida),Frisse, Grisélidis, HomoSFeRe, Les Amis du Bus des Femmes, Le Mouvement Français Planning Familial (Confédération Nationale), NPA, OuTRANS, Sol En Si (Solidarité Enfants Sida), STRASS (Syndicat du TRavail Sexuel), STS (Support Transgenre Strasbourg), TaPaGeS,TumulTueuses.

1- En plein milieu (trop au milieu à mon avis pour ne pas être une stratégie (un peu grossière, ceci dit)) des revendications féministes et LGBT, on trouve noyée dans la masse de propositions légitimes celle de la non-pénalisation des clients de prostituéEs.

2- Parmi la liste des signataires, la majorité des associations et groupes n'ont JAMAIS eu, à la base et historiquement parlant, de vocation féministe. Sida, droit des homosexueLs ou des transexueLs, oui, mais quel rapport avec la lutte féministe (et lesbienne) ? Les pro-prostitution n'hésitent pas à s'emparer des thématiques féministes et lesbiennes pour enrober leur revendication androcentrée. Une honteuse instrumentalisation.

3- Il est d'ailleurs curieux de constater comment ces associations occupent le terrain féministe avec une ferveur toute neuve depuis que l'abolitionnisme trouve un écho plutôt favorable dans les politiques et les mentalités ...

4- Précisons que ces associations sont essentiellement dirigées par des hommes qui envoient en première ligne des femmes en guise de caution féminine.

5- ILS prétendent revendiquer des droits pour TOUTES les femmes, sous-entendu les prostituées aussi. Mais pour ces dernières, c'est le droit de se prostituer qu'ils réclament. Lorsqu'on sait que 96% des prostituées aimeraient sortir de la prostitution mais estiment qu'elles n'y parviendront pas, on est en droit de se demander ce que recouvre chez eux ce "TOUTES les femmes". Entre quelques unes et la majorité, il y a un fossé allègrement franchi.

6- A noter également l'incohérence des revendications: alors qu'il a été reconnu par les instances internationales (dont l'ONU) que la prostitution faisait partie des violences contre les femmes et engendrait des situations de Stress Post-Traumatique, nous trouvons à quelques items d'écart la demande d'un loi-cadre contre les violences envers les femmes ET la revendication de perpétuation de cette violence par les clients-prostitueurs à travers leur protection.

7- Autre hiatus frappant: le souci d'égalité et d'éradication des stéréotypes sexistes aux côtés de la défense d'une activité particulièrement inégalitaire dans sa distribution. On nous parle bien de prostituéEs et des clienTs, non ? Ne reste-t-on pas dans une vision binaire et inégalitaire (l'un paye, l'autrE obéit) des rapports de sexe ?

8- L'allusion à l'ordre moral dans les propos liminaires est particulièrement déplacée de la part de personnes qui s'inscrivent dans une logique capitaliste de marchandisation des corps et dans une idéologie patriarcale de rapports de domination par l'argent.

9- L'abolitionnisme mettrait en danger ces femmes. C'est passer un peu vite sur le fait que le plus gros danger pour une prostituée reste le client et/ou le proxénète et c'est occulter tout le volet de prise en charge sociale, sanitaire et professionnelle préconisée dans le projet abolitionniste.

10- Bref, proposer au beau milieu de revendications progressistes et humanistes de perpétuer, soutenir et institutionnaliser in fine une activité née il y a quelques siècles de l'esclavage et s'alimentant encore aujourd'hui de la triple oppression (femme, précaire, étrangère), est tout simplement scandaleux.

dimanche 4 mars 2012

Le bas du front du mois (avec résultats + un lien pile poil)

Sur une idée dont je reconnais la maternité à Je suis féministe, j'inaugure une nouvelle rubrique interactive: un duel de trolls.

Le principe: voter en haut à gauche (au-dessus du petit oiseau) pour le commentateur dont vous aurez préféré la participation. La mauvaise foi, l'absurdité, le paternalisme, la méchanceté gratuite, l'ignorance et bien sûr la misogynie évidente seront autant de critères qui vous permettront de départager les concurrents.

Leurs citations sont extraites des sections "commentaires" de ce blog. Afin de ne pas être accusée bêtement de décontextualisation abusive, le prénom de chaque participant sera linké à la page originelle, histoire aussi de profiter de l'ensemble de l'oeuvre.

NB: les valeureux "Anonyme" se verront attribuer un prénom d'office pour les besoins du concours.

Ce mois-ci, donc (sur la base des commentaires postés en février):

Stéphane:


Disposer d'un sexe qui procure plus de plaisir qu'à l'homme, ne pas avoir à mettre de préservatif (ou rarement) n'est semble-t-il pas suffisant, vous voudriez encore avoir le monopole partout...

Roger (Anonyme du 26/02):


Nier la violence misandre, c'est se rendre complice de tous les crimes contre les hommes.






Edit du 12/03/2012:


A 14 voix contre 12, c'est bien notre anonyme Roger qui a gagné. J'avoue que j'avais déjà un faible pour lui car le coup de la violence misandre c'est de l'inédit.


J'en profite, puisque le sujet a été largement évoqué dans les commentaires, pour rapporter cette information transmise par Sisyphe:
Le Southern Poverty Law Center désigne les masculinistes comme organisations haineuses.




Extrait choisi:
Par exemple, les masculinistes citent souvent de fausses statistiques sur l’incidence et la prévalence des crimes sexuels commis par des femmes et de leurs sévices contre des victimes masculines, affirmant que la situation est au moins aussi mauvaise pour les hommes (si ce n’est pire), alors que la recherche démontre systématiquement que les hommes constituent une écrasante majorité des auteurs de violences, comme l’agression sexuelle en général, le viol et le harcèlement des partenaires intimes, et que les femmes sont très majoritairement les victimes de ces crimes. Sans surprise, la recherche montre tout aussi systématiquement que lorsque des hommes sont violés, ils le sont presque toujours par d’autres hommes, et non par des femmes.
On y retrouve aussi le problème du divorce (soulevé aussi dans les commentaires) qui les lèserait de la garde de LEURS enfants et briserait LEURS familles. L'instinct de propriété qui sous-tend la revendication est assez bien illustré par le commentaire de l'un des leurs et décrit un phénomène que l'on peine encore à pointer:


« Existe-t-il une loi du talion plus adéquate que le fait de tuer les enfants de celles qui étaient si disposées à détruire les familles des hommes, à détruire la patrie des hommes ? »






















jeudi 1 mars 2012

Réflexions sur l'anorexie autour du film Polisse

Avertissement: que celles et ceux qui n'ont pas encore vu Polisse* de Maïwenn, dont je vais dévoiler la fin, ne lisent pas ce qui suit.

Le film m'a littéralement scotchée. Je ne m'attendais pas à autant d'humanité et quand je dis humanité, c'est précisément parce que la brigade que le film suit est montrée aussi dans ses travers les moins glorieux. Des vrais gens, quoi.

Mais c'est sur la fin, dont le coup de théatre intervient dans la toute dernière minute, nous laissant pantois.e.s, que je souhaitais m'attarder. Iris, incarnée par Marina Foïs, l'une des policières que l'on suit, se jette subitement par l'une des fenêtres de la salle où se tient une réunion de rentrée. Sous l'oeil incrédule puis horrifié de l'assemblée qui n'a rien vu venir. 

Et nous passons du temps, spectateurs, spectatrices, à remonter le fil du film pour comprendre. Iris, l'info est distillée à plusieurs reprises, est anorexique. Elle éprouve de surcroît une rancoeur tenace envers les hommes ("tous des sa race"). C'est à peu près tout ce dont nous disposons.

Voici l'hypothèse qui n'engage que moi: Iris n'a pas choisi de travailler pour la Brigade de Protection des Mineurs par hasard. Elle a, comme tous ces enfants qu'elle accompagne dans les dépôts de plainte, subi des abus sexuels. Son métier c'est aussi sa quête personnelle. C'est l'occasion de rappeler, puisque peu le font, que l'anorexie fait partie des symptômes de stress post-traumatique directement liés aux violences sexuelles (50% des cas d'anorexie). Ce corps où siège désormais la souffrance et la honte, il faut le faire disparaître.

Les minutes qui précèdent ce que l'on pense sur le coup être une pulsion irraisonnée sont éclairantes quand on y revient. On y voit les images du petit garçon dont elle a pris antérieurement la déposition. Un petit gymnaste, abusé par son professeur désormais sous les verrous, qui parvient enfin à participer à la compétition qui lui fera gagner une médaille. Quand la tête d'Iris vient frapper le sol, le garçonnet brandit fièrement sa coupe. Il pourra peut-être passer à autre chose. Elle, n'en a jamais eu, n'en aura jamais, elle semble le comprendre à cet instant, la possibilité. Pas de reconstruction possible.

L'anorexie est l'un des troubles psychiques développés par les victimes d'abus sexuels. Cela ne veut pas dire que ces derniers sont la seule cause à ce désordre qui conduit parfois à la mort. Parfois ils se conjuguent comme c'est peut-être le cas pour Iris (dans le miroir qui renvoie un corps décharné, elle dit voir une "grosse").

Mona Chollet, dans Beauté Fatale, y consacre quelques paragraphes. Le lien entre l'exigence de minceur imposée par les hommes, Karl Lagerfeld et consorts en figures de proue du Mouvement d'Affamation** des Femmes, et l'anorexie n'est plus à démontrer. Il s'agit bien d'un diktat qui pourrit l'existence des femmes et les conduit parfois à la mort dans une indifférence quasi-générale. Elle relève la "transposition saisissante" de Naomi Wolf (The Beauty Myth) qui "imagine ce qui se passerait si l'anorexie touchait non pas les jeunes filles, mais les jeunes hommes, dont certains parmi les plus brillants et les plus prometteurs d'Amérique" et qui "parie qu'une affection frappant entre 5% et 10% d'entre eux, et ayant le taux de mortalité le plus élevé parmi les maladies psychiques, "ferait la couverture du Time, au lieu d'être reléguée dans les pages mode.""

Effectivement, il serait dommage pour la grande entreprise de contrôle des femmes que le fait soit connu, reconnu de tous et surtout de toutes. Car qu'il s'agisse de restreindre l'accès des femmes à la nourriture en période de famine ou d'abondance, c'est bien de contrôle par la frustration et l'affaiblissement qu'il est question.

La minceur féminine est bien un projet masculin, imposé aux femmes. L'argument malhonnête selon lequel ce sont les femmes qui l'ont inventée et n'ont qu'à s'en débrouiller ne passe pas le constat que la norme imposée l'est par ceux qui détiennent financièrement les médias et politiquement la culture: annonceuRs, producteuRs, actionnaiRes, couturieRs, etc. Et à votre avis, à qui sont destinés réellement les concours de beauté, la plupart des films, pornos en tête, les clips musicaux qui proposent des modèles de jeunes femmes qui n'ont su conserver leur plastique filiforme qu'au prix de leur santé ?

A qui et pourquoi ?


* mention BC (Bechdel Compatible) pour ce film !
** néologisme dont on ne peut plus faire l'économie

mardi 28 février 2012

L'ennemi des brouteuses, des gonzesses et des pédés

C'est Têtu qui relève les propos de Jean-Louis Murat. Je vous laisse mesurer les dégâts provoqués sur ce primaire individu par la farce certainement trop carnée de ses choux farcis:



On le connaissait en chanteur attaché à la ruralité, inspiré par la nature. On le découvre ennemi des «brouteuses». Jean-Louis Murat est interviewé dans le numéro de février/avril de Grand Seigneur, le magazine «food et lifestyle» de Technikart, sorti mercredi en kiosque. Le musicien auvergnat s'y déclare «roi du chou farci», disserte sur le fromage, sur le vin... Mais il s'en prend également à une journaliste de Télérama* dans des propos lesbophobes et se déclare «contre le broutage».


«Je me fais tout le temps allumer dans Télérama par une brouteuse de base, avance-t-il. La brouteuse me déteste, je suis l'ennemi de la brouteuse. Et d'ailleurs je suis contre le broutage, donc elles doivent le sentir.» Le journaliste qui l'interviewe ne prend pas la peine de relever ces propos et passe à autre chose.

«Un vin que les filles ne peuvent pas boire»

L'auteur de la chanson Les gonzesses et les pédés n'hésite pas à aligner les perles et exprime également une curieuse vision des femmes et de la masculinité. «Pour moi, le vin, ça ne doit pas être trop fruité, affirme-t-il. En tournée, on nous emmène dans des restaurants où on nous sert des pisse-machin qui coûtent la peau des fesses, mais ce n'est pas bon. Je trouve que les vins maintenant, ça vient réveiller la femelle qui sommeille en chaque buveur, vous voyez ce que je veux dire? (...) Pour moi un vin de mec, c'est un dur à boire, c'est-à-dire que le filles ne peuvent pas le boire.»

Jean-Louis Murat s'était déjà fait remarquer avec une sortie sur Marc-Olivier Fogiel: «Il se trémousse tellement qu'on dirait qu'il s'est collé un gode sur sa chaise» avait-il déclaré. Thierry Ardisson avait été condamné à verser 3 000 euros de dommages et intérêts à l'ancien animateur d'On ne peut pas plaire à tout le monde pour avoir répété ces propos.

* Journaliste-critique musicale pour Télérama, je ne vois que Valérie Lehoux dont les papiers sont d'une rare justesse. Elle met souvent en avant les artistEs et c'est pas commun. Des artistEs qui n'ont jamais volé leur pleine page: Daphné, Camille ou Claire Diterzi. Probablement que voir de la musique de gonzesses (trop fruitée aussi ?) lui voler la vedette a dû trop fortement ébranler son égo viril de merde.


samedi 25 février 2012

Les mots justes (1ère partie)

Elle a raison Nicole-Claude Mathieu:


"Le mot "domination" porte l'attention sur des aspects relativement statiques de "position au-dessus" telle la montagne qui domine; d'"autorité" et "de plus grande importance". Tandis que le terme d'oppression implique et insiste sur l'idée de violence exercée, d'excès, d'étouffement [...]."
La domination induit une supériorité naturelle, passive et absolument fortuite. Visuellement, cela ressemblerait à une ombre gigantesque et immobile au-dessus d'un groupe opprimé inerte et impuissant.

Or, il n'en est rien. Les oppresseurs ne maintiennent leur supériorité, montée de toutes pièces, qu'à grands renforts de répression, qu'elle soit symbolique ou factuelle. Les oppresseurs agissent pour perpétuer le système qui les favorise. Et cette supériorité dont ils (se) sont parés n'est que le reflet d'une société bâtie à leur image. Une société qui prend la position sociale pour de la grandeur, la violence pour du courage, le mépris pour de l'intelligence, etc.

Les opprimées, quant à elles, ont déjà fait bouger les contours du cercle dans lequel elles ont été circonscrites et continueront tant qu'il le faudra. La domination est peut-être inéluctable, pas l'oppression.

vendredi 24 février 2012

Parole de survivante

Je relaye ci-dessous un texte de Rebecca Mott traduit par Martin Dufresne:



Prostitution - Méthodes de l’esprit proxénète


Un très petit groupe de militantes ayant quitté la prostitution ont pris contact les unes avec les autres, et certaines d’entre nous écrivons des articles, publions des blogs et menons un travail de sensibilisation par l’écrit et par la prise de parole publique lors de conférences.



Nous avons longtemps fait cela dans l’isolement, voyant nos écrits en butte à une foule d’attaques et de tentatives de nous faire taire.


Ces attaques sont typiques d’une attitude d’esprit propre au proxénète (le « pimp »), et d’autres attitudes que nous avons appris à reconnaître chez les prostitueurs (les « clients »). Que la personne qui nous attaque ainsi soit ou non réellement un proxénète ou un prostitueur n’a aucune importance. Ce qui compte, c’est son attitude d’intimidation, son refus de prendre au sérieux la violence dont nous témoignons, sa décision que nous devons être des malades mentales, son choix de disséquer nos écrits pour y chercher des preuves que nous sommes des menteuses.


La plupart des attaquants se cachent derrière le prétexte d’un souci de notre bien-être mental, mais dès qu’ils en ont la chance, ils nous gratifient de vicieuses attaques personnelles.


On nous mène cette guerre parce que nos paroles et nos écrits sont maintenant devenus trop puissants, ils se répandent dans trop de domaines influents.


Nos paroles et nos écrits disent les mêmes vérités en des voix multiples, dans des styles multiples, à partir de cultures et d’origines multiples.


Ces vérités sont maintenant entendues et crues, ce sont les pierres angulaires d’une reconnaissance du fait qu’une vaste majorité de la classe prostituée revendique aujourd’hui l’abolition du commerce du sexe.


Nos vérités sont l’amorce d’une puissante révolution – il n’y a donc rien de surprenant ou de choquant à constater ces attaques cruelles venant des gens pour qui est lucratif le maintien du commerce du sexe.


Mais il est important pour celles et ceux qui soutiennent notre lutte et nos écrits de reconnaître certaines des tactiques de nos ennemis.


Il y a la voix classique du prostitueur en colère : il est furieux contre nous, nous accusant de haïr tous les hommes ; à l’en croire, nous considérons tous les hommes comme mauvais et cruels envers toutes les femmes à tout moment.


Ces « hommes » n’utilisent peu ou pas la pensée rationnelle ; à quoi bon cet effort quand, dans leur esprit, ils ne parlent qu’à des marchandises sexuelles rétives. Ils en viennent d’ailleurs très vite à nous qualifier de « putains », de « putes » ou de « salopes ».


Beaucoup de ces hommes qui manifestent l’attitude de prostitueur vont utiliser nos paroles et tenter d’en faire un scénario porno, toujours en laissant entendre – ou en disant explicitement – que nous avons dû bien aimer ce qu’on nous faisait.


L’attitude du prostitueur a pour nous des effets déclencheurs, elle nous blesse profondément – mais elle suscite également chez nous une énorme colère, une puissance qui donne encore plus de pertinence à nos écrits.


Nous reconnaissons le prostitueur à ses mensonges, à sa volonté de manipuler, de se faire passer pour la victime, à sa vision des femmes comme une série d’orifices à baiser, jamais des êtres humains à part entière.


Nous prenons notre douleur – celle que les prostitueurs nous ont forcées à intérioriser – et nous la réinventons pour en faire une puissance et montrer la réalité du client et de la violence qui est infligée à l’ensemble de la classe prostituée.


La plupart des attaques qui se poursuivent contre nous reflètent ce que j’appelle l’esprit proxénète.


Cet état d’esprit est souvent exprimé par des femmes, ou du moins par des personnes qui prétendent être des femmes – il est évident que sur Internet, je n’ai aucune idée de leur véritable identité et, pour être honnête, je m’en fous complètement.


Une méthode commune pour tenter de nous discréditer consiste à feindre l’inquiétude pour notre bien-être mental.


Ce souci ne tient pas au fait que le commerce du sexe est, en tant qu’institution, bâti sur la destruction de la condition mentale de la classe prostituée. Ce n’est pas non plus parce que nos attaquants reconnaissent que vivre à l’intérieur d’une situation de torture permanente peut affecter l’équilibre des personnes prostituées.


Non, ils choisissent d’aiguiller la conversation sur le plan personnel, en suggérant que nous devons avoir de graves problèmes de santé mentale ou être trop délicate/fragile pour faire face à la prostitution, ou pour être désormais dans le monde extérieur.


Cette prétention est risible : je ne connais pas une seule femme ayant quitté la prostitution qui n’ait pas une énorme volonté et force intérieure, et c’est également le cas de la grande majorité des femmes et des jeunes filles en prostitution.


Ce n’est pas une faiblesse ou même l’état mental de chaque femme qui provoquent la violence qui est la norme dans tous les aspects de la prostitution : ce sont les prostitueurs qui font le choix du sadisme envers celle qu’ils prostituent ; ce sont les profiteurs du commerce du sexe qui imposent à la classe prostituée des conditions tellement sous-humaines que toute violence à son égard devient acceptable ; et ce sont tous ceux qui ferment les yeux sur la destruction de la classe prostituée.


Chercher une cause du côté de l’état mental de la personne prostituée constitue un faux-semblant, un détournement d’attention pour laisser entendre que sa condition est de sa faute et pour rendre invisible la violence masculine.


Mais du côté des attaquants, la tactique est encore plus vicieuse.


La raison pour laquelle ils mettent l’accent sur l’état mental de l’ex-prostituée est leur volonté de prouver qu’elle est confuse, qu’elle ne peut pas vraiment connaître la vérité.


C’est leur recherche de preuves selon lesquelles elle doit être une menteuse.


Si les adeptes du commerce du sexe étaient si convaincu-es que la prostitution est non violente et conviviale pour les femmes, est-ce que leurs tactiques seraient aussi personnelles et cruelles ?


Lorsqu’elles écrivent ou s’expriment en public, la plupart des femmes ayant quitté la prostitution citent des éléments de leur histoire personnelle, mais elles le font habituellement parce que ces éléments sont rattachés à la violence commune de la prostitution, parce que leur histoire est profondément liée à celle vécue par l’ensemble de la classe prostituée.


Nous parlons du vécu collectif des personnes prostituées, de la violence sadique qui est commune dans tous les aspects de la prostitution, de ce qui a tenté de faire de nous moins que des êtres humains ; nous parlons d’avoir compris que l’on nous a torturées.


Pourtant, nous voyons nos attaquant-es rejeter toutes nos paroles, s’en débarrasser – en les qualifiant d’histoire pathétique d’une femme malade.


Cette prétention est au-delà du ridicule - il est pathétique de recourir à ce genre de personnalisation alors que tous nos écrits sont profondément politiques.


Mais justement, l’esprit proxénète vise à continuer à traiter en sous-hommes les femmes ayant quitté la prostitution, pour mieux les discréditer.


Comme tout proxénète, ces personnes prétendent que les femmes sorties de la prostitution et maintenant abolitionnistes détestent les personnes prostituées et veulent les voir crever de faim dans la rue.


On oublie commodément que nous étions pour la plupart dans la prostitution pratiquée à l’intérieur et sur de longues durées, et que nous avons habituellement beaucoup d’amies qui sont dans la prostitution ou qui en sont sorties.


On préfère prétendre que les femmes sorties de la prostitution jugent et haïssent les prostituées elles-mêmes – et non les prostitueurs, les profiteurs, et tous ceux qui ferment les yeux sur les meurtres, les viols et les tortures infligées à la classe prostituée.


Bref, si nous osons prendre la parole, c’est nous-mêmes que l’on blâme pour tous les maux du commerce du sexe.

Wow, c’est la définition même de la double pensée !
 J’aurai peut-être d’autres exemples à citer de ce genre d’attaques et peut-être avez-vous votre propre opinion de ces personnes et de la haine dont elles font preuve.
 Car c’est bel et bien de la haine – vouloir ainsi maintenir le statu quo d’un commerce du sexe qui détruit lentement la classe prostituée.






Il me faut en rire pour ne pas en pleurer.


Rebecca Mott, écrivaine.

jeudi 23 février 2012

Féministe, et vous ?

A écouter ce soir sur France Culture à 17 heures ou plus tard en podcast, l'émission "Sur les docks" consacrée au féminisme. La sélection d'intervenantes répare une injustice criante (la censure des féministes dans les médias) et mérite d'être saluée. Il est très rare d'entendre Christine Delphy sur les ondes, par exemple, malgré la richesse et la rigueur de ses travaux.

Osez le féminisme

Christine Delphy

La Barbe

Lola Lafon

Elsa Dorlin


Le magazine Causette

La maison d'éditions Talents Hauts

La blogueuse des Entrailles de mademoiselle faisait également partie des invitées lorsque j'ai regardé la programmation avant-hier. Elle en a disparu depuis, je suis déçue ...



En tous cas, ça nous changera des Badinter et Iacub sans cesse invitées sur France Inter ...

mardi 21 février 2012

La faiblesse est une vue de l'esprit



Appeler les femmes « le sexe faible » est une diffamation ; c’est l’injustice de

l’homme envers la femme.

Si la non-violence est la loi de l’humanité, l’avenir appartient aux femmes.

mohandas karamchand gandhi

dimanche 19 février 2012

Elles ont toujours l'oeuf

J'ai pour habitude de me soigner avec les huiles essentielles et j'ai, à cet effet, quelques ouvrages auxquels je me réfère souvent dont "100 réflexes aromathérapie" de Danièle Festy. Comparaisons faites, les conseils sont plutôt pertinents mais j'ai découvert à la fin de l'ouvrage un index des pathologies classées en quatre catégories qui m'a laissée perplexe: Les femmes, Les Hommes, Les Enfants, Problèmes (comprendre Tout le monde).

Les femmes:                                       Les hommes:

- Accouchement                                  - Libido (baisse de)
- Allaitement                                      - Prostate (troubles)
- Bouffées de chaleur
- Cellulite
- Couperose
- Cystite
- Démangeaisons vaginales
- Femme enceinte
- Jambes lourdes
- Maladie de Raynaud
- Rétention d'eau
- Troubles des règles
- Vergetures

1. Je ne savais pas que les bouffées de chaleur, la couperose (due aussi à l'alcoolisme ...), les cystites (infections urinaires), les démangeaisons génitales, les jambes lourdes, la maladie de Raynaud ainsi que les vergetures étaient des troubles exclusivement féminins. Même la rétention d'eau peut être observée chez les hommes.

2. De 13 pathologies présentées comme féminines, nous passerions à 5 si le fait que les femmes y soient plus exposées (ou plus enclines à en parler ...) ne valait pas exclusivité ! Voire 4 si l'on prenait en compte l'observation de cellulite chez les hommes.

3. Et même 1 si l'on arrêtait de considérer abusivement accouchement, allaitement et femme enceinte comme des pathologies.

4. Pourquoi alors ne pas avoir mis dans la catégorie Les hommes, les affections auxquelles ils sont plus sensibles: hypertension artérielle ou crise de goutte, par exemple ?

5. La catégorie Les femmes a quand même échappé à dépression, spasmophilie, humeur en dents de scie, minceur et fatigue. On avance !

6. Par contre, la libido réservée à Les hommes et non pas à Tout le monde, c'est comment dire ? ... J'ai le mot sur le bout de la langue, aidez-moi !