mardi 13 juillet 2010

Louise Labé



On pourra croire ici à une note d'Euterpe !!! C'est en tous cas son billet sur la poètesse Anne de Marquets qui est à l'origine de celui-ci.

En menant une recherche sur les poètesses et poètes du XVIème siècle, je suis tombée sur la biographie de celle que l'on appelle encore "La Belle Cordière". Sur sa biographie et sur la polémique qui a divisé les spécialistes de ce siècle.

En effet, devant le peu de renseignements à son sujet, certain.e.s ont a avancé que Louise Labé ne serait qu'une fiction élaborée par un groupe de poètes de l'époque. On sait pourtant pertinemment que les informations relatives aux femmes ne sont péniblement accessibles qu'à partir du XIXème siècle. Archives, registres, recensements ou listes électorales a fortiori ne consignaient que les hommes.

Une femme qui a du talent et dont le travail traverse les siècles est forcément soupçonnée ... Ici, en l'occurence de n'avoir même pas existé !!!

Ceux qui ont cherché à réfuter cette thèse, comme Daniel Martin, avancent pour preuve qu'il est peu probable que l'un des poètes contemporains,  gravitant autour du groupe en question, ait ignoré "une supercherie dont on nous dit par ailleurs que tout le monde en était informé".

L'argument est léger. Il suffit pourtant de se pencher sur ses écrits pour comprendre qu'il s'agit bien d'une femme qui parle.

Est-ce qu'un homme aurait pu déclarer qu'il voudrait voir les femmes : "non en beauté seulement, mais en science et vertu passer ou égaler les hommes" ?

Est-ce qu'un homme aurait plaidé "pour un plus juste équilibre des relations entres les hommes et les femmes" ?

De plus, quelle idée saugrenue aurait été celle de ce groupe de poètes de se faire passer collectivement pour une femme alors que les femmes elles-même avaient toutes les peines du monde à être prises au sérieux et obtenir une reconnaissance de leur travail.

Je n'ai jamais eu vent d'un homme artiste dont aurait a posteriori remis en question la paternité de l'oeuvre au profit d'une femme. Les femmes, en revanche, subissent sans cesse cette tentative d'invisibilisation.

Le peu qui subsiste d'elles est peut-être encore trop.

6 commentaires:

  1. très intéressant ! entre Euterpe et toi, là on franchit carrément tous les échelons jusqu'au doctorat ès féminisme :o) j'adore ... et quant à ta dernière phrase, tu ne peux pas savoir comme elle sonne pile juste, et me rappelle ce que disait Dworkin sur le "soi" des femmes, les femmes dit elles en ont toujours trop de ce "soi", et les hommes jamais assez ... et ton analyse au travers de ces textes a exactement ce sens là.

    RépondreSupprimer
  2. ah ben et en remontant je vois que tu cites toi même Dworkin, là on est vraiment en terrain de reconnaissance :o)) ça fait du bien !

    RépondreSupprimer
  3. Merci pour l'hommage ! Et Louise Labé fait aussi partie de mon programme, bien sûr ! Ce que tu écris me fait "plaisir" parce que le but que je vise en déterrant ses mortes sur lesquelles s'est abattu une telle chape de plomb, est là : montrer A QUEL POINT on nous jette dans les oubliettes de l'histoire. Au XVIe siècle, par exemple, la reine de Saba, la reine des Amazones, et autres reines dites aujourd'hui "LEGENDAIRES" (ben voyons) ne l'étaient pour personne. De même rendre la réalité de l'existence de Louise Labé sujette à caution est insupportable. Et dans quelque temps George Sand aura été réellement un homme.
    J'ai envie de dire avec Anne de Marquets à tous ces bonhommes qui veulent nous enterrer complètement pour nous chiper nos mérites qui ne leur reviennent pas : "n'enviez nos honneurs / contentez-vous des vôtres" ! Nom d'une pipe !

    RépondreSupprimer
  4. @ Emelire

    Merci pour tous ces compliments non mérités mais acceptés quand même (l'occasion est si rare de se voir gratifiée pour des propos féministes !).

    Dworkin ? elle a une place particulière dans ma bibliothèque. C'est vrai qu'elle est un signe de reconnaissance entre féministes parce qu'elle a su parler de la violence (quelle qu'elle soit) contre les femmes comme aucune autre.

    RépondreSupprimer
  5. @ Euterpe

    Ce billet est un "ovni" dans mon blog, je ne suis pas assez calée pour prétendre t'imiter !!!

    En parlant d'Histoire, je suis en train de lire l'historienne Michelle Perrot. Spécialiste des grèves ouvrières et du monde du travail par extension, elle s'est attachée dans "Les femmes ou les silences de l'Histoire" à retracer l'impact historique des femmes à partir du XIXème siècle. C'est passionnant !!!

    Et cela pourra t'intéresser (remarque, tu le connais peut-être) parce que l'angle est résolument féministe chez Perrot, elle a dirigé "L'Histoire des femmes en Occident de l'Antiquité à nos jours".

    RépondreSupprimer
  6. Oui, en effet, il faudra que je le lise. J'avais déjà remarqué ce titre sur une de tes notes précédentes et il m'avait d'autant plus alléché que j'aurais quasiment pu appeler mon blog comme ca ! Mais malheureusement c'est déjà un boulot monstre de comprendre le XVIe siècle, et ca me laisse peu de marge pour lire autre chose, ce que je regrette d'autant plus qu'en vous lisant Emelire et toi, je m'apercois que ma culture féministe est des plus misérables !
    Par contre "L'Histoire des femmes en Occident de l'Antiquité à nos jours", il est impossible qu'il ne soit pas passer entre mes mains...un enquête s'impose...

    RépondreSupprimer

Votre commentaire n'apparaîtra qu'après validation de l'administratrice de ce blog.